« Contre l’ethnicisation de la question sociale »

Article paru in REGARDS SUR L’ACTUALITE –  Janvier 2007

 par Bariza KHIARI – Sénatrice de Paris, membre du Bureau National du parti socialiste

La Marche pour l’Egalité de 1983, rebaptisée – au grand dam de ses participants – « Marche des Beurs » (On trouve déjà dans cette appellation une référence ethnique) a finalement débouché sur une impasse politique : le combat anti-raciste des années 1980 n’a fait ni reculer l’extrême droite, ni même amélioré concrètement la situation de plusieurs générations issues de l’immigration. Le fameux « Touche pas à mon pote » – que j’ai moi-même arboré – a permis aux pouvoirs publics de s’affranchir de leurs responsabilités, tout en évinçant la problématique de l’égalité réelle. En attendant, des millions de personnes tentaient, en vain, non de s’intégrer, mais d’être reconnus en fonction de leurs seuls mérites et compétences.

Il a fallu bien des années de combat pour dissiper cet écran de fumée et replacer le débat sur le terrain de l’égalité républicaine. Il a fallu bien des années pour convaincre que le mal à combattre est moins le racisme et les racistes que des pratiques sociales courantes qui, répétées et accumulées, aboutissent à exclure du marché du travail, de l’accès au logement et aux loisirs, beaucoup de nos concitoyens, issus de l’immigration, ou de couleur. Ce n’est qu’en 2003, au Congrès de Dijon, que le parti socialiste signait, unanime, une contribution où figurait dans le titre même l’impératif de « lutter contre les discriminations ». Depuis, le chapitre « lutte contre les discriminations » s’impose comme une figure incontournable du discours politique de droite comme de gauche. On observe une multiplication de colloques, débats, événements ayant pour objet de promouvoir la diversité, et de valoriser les expériences positives des minorités visibles. On assiste aussi à une prise en compte croissante de cette problématique par les partis politiques, même si elle ne semble toujours pas figurer parmi leurs priorités. Le paradigme de l’intégration a enfin cédé la place à celui de l’égalité. Au-delà d’une prise de conscience incontestable, une politique de l’égalité réelle n’a pas encore été mise en actes, et nous n’en sommes qu’à l’an I de la lutte contre les discriminations.

Dans ce nouveau contexte, et au nom de la nécessaire évaluation des politiques publiques, certains responsables politiques, relayés par des chercheurs, réclament la légalisation des statistiques ethniques. Leurs arguments ont l’apparence du bon sens : pour évaluer les politiques de promotion de la diversité, il faudrait pouvoir mesurer la progression des différentes “minorités” dans les entreprises, les administrations, les universités, le logement social, etc. Tel est leur raisonnement, que je considère pour le moins contestable.

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Recensement « ethnique » : le débat français

Le Monde – 18 septembre 2007 par Laetitia Van Eeckhout

L’événement aurait été impensable il y a quelques années : le 19 octobre, à Paris, à l’initiative du Centre d’analyse stratégique (l’ancien Commissariat général du plan), a eu lieu un colloque intitulé « Statistiques ethniques ». Pourtant, en France, il n’y a ni Noirs, ni Arabes, ni Asiatiques, du moins au regard des statistiques.

La République, « indivisible », ne reconnaît que des citoyens égaux, « sans distinction d’origine, de race ou de religion ». La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) l’a rappelé, le 8 juillet 2005 : le droit français autorise la collecte de données sur la nationalité et le lieu de naissance d’un individu et de ses parents. Il interdit de « recueillir des données relatives à l’origine raciale ou ethnique, réelle ou supposée ».

« On est arrivé à un point tel de [discrimination] que le comptage ethnique ne peut être pire que l’inaction actuelle », objecte Patrick Lozes, président du Conseil représentatif des associations noires (CRAN), créé en novembre 2005. Pour lui, il ne s’agit pas de légaliser les races ni d’évaluer les ethnies, mais de mesurer les discriminations pour mieux les combattre.

« L’établissement progressif de statistiques ethniques est sans doute devenu inévitable », a soutenu, le 19 octobre, la sociologue Dominique Schnapper, très attachée aux valeurs républicaines. « Inéluctable », explique-t-elle, car ce serait la seule voie permettant de tenir les promesses du pacte républicain et de garantir une « égalité réelle » entre les citoyens, sans distinction d’origine ni de race. La sociologue reste prudente car le débat, éminemment politique, soulève les passions.

La controverse transcende le clivage gauche-droite. Le ministre de l’intérieur et probable candidat à l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy, s’est déclaré favorable à la mention de l’origine, dans les entreprises comme dans les statistiques de la délinquance.

Se posant en défenseurs du modèle républicain, le chef de l’Etat et le premier ministre ont tout fait pour enterrer cette proposition, à laquelle ils sont farouchement hostiles. Pourtant favorable, le ministre délégué à l’égalité des chances, Azouz Begag, a renoncé à porter le débat, par fidélité envers Dominique de Villepin. Jacques Chirac peut aussi compter sur Louis Schweitzer, qu’il a nommé à la présidence de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité (Halde). Pour l’ancien PDG de Renault, le comptage ethnique est une « méthode lourde de risques », qui « nourrit une logique de séparation des communautés ».

La fabiusienne Bariza Khiari, sénatrice (PS) de Paris, craint elle aussi qu’« on n’ouvre la porte à la discrimination positive, aux quotas », et qu’« on ne bascule vers un autre modèle ». Les socialistes ont inscrit dans leur projet la mise en place d’« un bilan de l’égalité ». Cette mesure, défendue par Faouzi Lamdaoui, délégué national chargé de l’égalité des chances et de la lutte contre les discriminations, a failli disparaître : elle entraînait la question des statistiques ethniques. Pour s’y soustraire, les socialistes ont préféré préciser que ce bilan n’intégrerait que « des statistiques en fonction du domicile des salariés ».

Pour l’heure, les trois candidats à l’investiture du PS ne se sont pas prononcés sur le sujet. Dominique Strauss-Kahn dénonce les « discriminations liées au nom, à la couleur de peau, au quartier », mais les statistiques ethniques sont un « faux sujet » pour lui. « Le sujet est moins d’avoir une polémique sur les moyens de préciser l’ampleur du phénomène que de lutter contre, de définir des outils pour faire reculer ces discriminations, explique son conseiller, Christophe Borgel. L’ampleur du phénomène est connue. C’est la volonté politique qui manque. » Sentiment que M. Strauss-Kahn partage avec Ségolène Royal : « L’objectif est de passer à l’acte pour une égalité réelle. », insiste sa conseillère Sophie Bouchet-Petersen, qui ajoute que Mme Royal est opposée « à l’ethnicisation du social ».

Pourtant, et contrairement à une idée reçue, la statistique publique est habilitée à différencier les Français selon leurs origines, et de très longue date. Les enquêtes à large échantillon menées depuis des années par les instituts de statistiques publics (Insee, INED, Cereq) offrent même des données de plus en plus précises sur les parcours d’intégration des populations issues de l’immigration et sur les obstacles rencontrés. En s’appuyant sur la nationalité de naissance, l’origine géographique, les trajectoires familiales, voire la langue parlée, ou même sur des données ethniques.

« Il est permis de poser dans les enquêtes publiques des questions «sensibles» quand elles sont proportionnées aux objectifs de l’enquête et que les répondants ont donné leur accord express », précise François Héran, directeur de l’INED.

La question est de savoir si l’on systématise l’usage de ces questions « ethno-raciales » dans les enquêtes publiques, alors qu’elles ne figurent, actuellement, que dans des enquêtes ponctuelles sur un problème donné. Et si l’on autorise des organismes de gestion – et donc des entreprises – à créer des outils d’évaluation de la diversité, avec référentiels ethniques.

Le contexte européen semble inciter la France à adopter un dispositif statistique plus complet et à en faire davantage usage. L’Union européenne a engagé un important programme d’action de lutte contre les discriminations directes et intentionnelles, mais également indirectes et non intentionnelles. On parle de discriminations indirectes lorsque des règles ou des pratiques apparemment neutres désavantagent certaines personnes par rapport à d’autres, de manière injustifiée et systématique.

Or, si les directives communautaires n’imposent pas aux Etats membres d’intégrer à leur appareil statistique les différents chefs de discrimination (origine ethnique, orientation sexuelle, convictions religieuses…), les discriminations indirectes ne peuvent s’apprécier concrètement qu’à travers une comparaison entre le groupe ethnique ou racial considéré et le groupe de référence. Jean-François Amadieu, professeur de gestion à l’université Paris-I – Panthéon-Sorbonne et directeur de l’Observatoire des discriminations, admet qu’il est difficile de mettre en évidence une discrimination sans dispositif statistique adapté. « Le «testing» ne suffit pas à tout démontrer. Le constat d’un processus de recrutement discriminatoire dans une entreprise ne peut être établi sur la base d’un seul cas », explique-t-il. Le choix entre deux candidats peut être aléatoire et tenir à d’autres facteurs qu’ethniques, comme, par exemple, la voix ou la gestuelle pendant un entretien d’embauche.

Pour autant, estime M. Amadieu, utiliser des méthodes se référant à l’ethnicité n’est pas nécessaire. « On peut le faire simplement en utilisant, par exemple, les prénoms des individus », suggère-t-il, soulignant les risques de dévoiement d’un outil « ethno-racial » par les entreprises.

Pour Samuel Thomas, vice-président de SOS-Racisme, comme pour Jan Robert Suesser, de la Ligue des droits de l’homme (LDH), le comptage ethnique, loin de promouvoir l’égalité de traitement, aboutirait à renforcer les comportements discriminatoires et racistes. « La raison donnée par le ministre de l’intérieur à l’établissement de statistiques ethniques sur les délinquants n’est pas la lutte contre les discriminations, mais des impératifs de transparence envers les citoyens », relève M. Suesser. « Les critères ethniques sont toujours utilisés négativement. Les mesures de diversité servent actuellement dans les entreprises ou chez les bailleurs à mettre en place des seuils et des quotas », soutient de son côté M. Thomas. Alain Blum, directeur d’études à l’EHESS et à l’INED, s’insurge contre les effets stigmatisants des référentiels ethniques, qui assignent à chacun une identité définitive et réductrice, liée à l’apparence physique ou à l’appartenance à une communauté arbitrairement définie.« L’ethnicité a peu à voir avec les origines, elle est liée au regard d’autrui », fait-il valoir.

« Quand l’usage du critère racial est flagrant, pourquoi ne pas l’évoquer ? », objecte Patrick Lozes, pour qui le débat ne peut se réduire à la seule problématique migratoire. Et les indicateurs d’origine – nationalité, patronyme, pays de naissance des individus ou de leurs parents – ne suffisent plus à identifier les discriminations ethniques et « raciales ». « La nationalité n’est plus une protection contre les discriminations. On parle de personnes qui n’ont pour la plupart jamais migré ! », relève M. Lozes.

« Il faut renoncer au critère de l’origine, qui stigmatise et perpétue le statut de migrant de l’individu. La recherche d’une ascendance étrangère trahit un désir de maintenir dans un statut allogène. Jusqu’à quand sera-t-on étranger ?, renchérit Yazid Sabeg, fils de docker algérien devenu PDG et coauteur avec Laurence Méhaignerie des Oubliés de l’égalité des chances (Institut Montaigne). Le pays de naissance n’est pas équivalent aux phénotypes, à la perception de l’individu par autrui et/ou par lui-même. En France, il n’y a pas de races, mais du racisme, des phénotypes qui génèrent des discriminations.»

Pour Yazid Sabeg et Patrick Lozes, il faut redonner au débat et à ces statistiques leur raison d’être : la mise en évidence et la répression des discriminations indirectes. « On cherche à mesurer les inégalités de traitement. La question n’est pas de mesurer la diversité d’une entreprise à un instant «T» et de lui délivrer un label diversité. Il faut mettre un coup d’arrêt à cette idée », soutient Jean-François Amadieu.

La mise en place d’outils statistiques dans les entreprises ne peut être une fin en soi, insiste Patrick Simon, chercheur à l’INED. « En Belgique, dit-il, en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas, la mise en place de monitorings de la diversité dans les entreprises s’inscrit dans un dispositif public de lutte contre les discriminations. Et répond au développement de mesures antidiscriminatoires. »

La CNIL, restée jusqu’alors dans le droit-fil républicain, est consciente qu’elle ne peut se contenter de rappeler ce que dit la loi. Plusieurs membres se posant des questions, son président, Alex Türk, a engagé une nouvelle réflexion nourrie d’auditions et destinée à « essayer de poser de nouveaux principes ».

Sur fond de crise des banlieues, le sujet est aujourd’hui de plus en plus prégnant, reconnaît-il : « Nous devons nous poser la question d’un référentiel ethno-racial, regarder en quoi cela consisterait, comment qualifier les situations de fait, comment les valider. La société glisse vers cette solution, mais faut-il aller jusqu’au bout ? Et si oui, comment la mettre en œuvre, l’encadrer ? » La CNIL souhaite achever ses travaux d’ici à février, pour pouvoir les soumettre aux candidats à l’élection présidentielle. Car, pour M. Türk, « sur cette question délicate, le législateur devra intervenir ».

 

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SENAT- Déclaration du Gouvernement sur la situation au Proche-Orient – Janvier 2009

Intervention de Bariza KHIARI en séance publique du Sénat

14 janvier 2009

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je ne reviendrai pas sur les propos de Mmes Monique Cerisier-ben Guiga et Josette Durrieu, dont je partage les analyses et les préoccupations. Chacune d’entre elles a traité un aspect de cet horrible conflit, qui touche de manière massive les populations civiles. Pour ma part, je m’attacherai à en décrire les conséquences sur le plan intérieur, en m’intéressant à la manière dont il affecte notre nation.

Notre pays connaît une période de tensions fortes, marquée d’actes condamnables et odieux : tombes et synagogues profanées, personnes des deux communautés prises à partie. Ainsi, dans ma circonscription, deux lycéens d’origine maghrébine du lycée Janson-de-Sailly – c’est le lycée où sont scolarisés mes enfants – ont été agressés parce qu’ils ont refusé des tracts distribués par une organisation de soutien à Israël.

J’ai parfois le sentiment qu’émergent désormais des musulmans et des juifs plus que des citoyens. Cette situation donne l’occasion à certains d’utiliser des référentiels identitaires comme mots d’ordre politiques, en expliquant que l’universalisme républicain ne serait plus un modèle. Cela représente aujourd’hui un réel danger.

Mais cette importation présumée du conflit sur notre territoire ne doit pas nous leurrer. La République est mise à mal non pas par un éventuel réveil du religieux et de l’ethnique, mais par la désagrégation du lien social. Certaines personnes se sentent exclues, et la frustration qu’elles ressentent trouve un écho dans celle des populations palestiniennes. À l’occasion de ces malheureux événements, une telle identification par la relégation et l’injustice offre un exutoire dans un combat de substitution, à travers une explosion de colère.

Nous l’avons vu lors des manifestions qui se sont déroulées dans toute la France, d’autres jeunes se mobilisent désormais dans le cadre d’une citoyenneté active. C’est nouveau. Il ne faut sous-estimer ni leur indignation ni leur frustration.

Aussi est-ce une réponse politique au Proche-Orient et une réponse sociale en France qu’il faudra apporter.

Au sujet de sa judéité, Raymond Aron déclarait ceci : « Je suis Français, citoyen français, et je reste en fidélité avec la tradition qui m’a porté. » Je fais mienne cette citation. Les identités multiples nous concernent tous. Nombre de Français de confession juive se sentent préoccupés par la sécurité d’Israël. Issue moi-même de la culture arabo-musulmane, je vis, comme d’autres, avec le problème palestinien inscrit dans ma conscience politique. Ce conflit se transmet maintenant de génération en génération et contribue à forger une « identité tragique » des deux côtés. Il existe un terreau commun en dépit des différences, ne laissons pas nos enfants grandir dans la haine de l’autre.

Pourquoi évoquer nos enfants ? Parce que nous avons les plus importantes communautés musulmane et juive d’Europe. Aussi nous devons-nous d’être attentifs à ne pas faire de différences entre les communautés et, surtout, à ne pas confessionnaliser ce conflit.

Dans ce contexte, que penser de la convocation des seuls Conseil représentatif des institutions juives de France et Conseil français du culte musulman au ministère de l’intérieur ? Une telle question est politique, et non religieuse. C’est un conflit géopolitique avec lequel interfère le phénomène religieux, et non l’inverse. Le prisme religieux donne une coloration spécifique, ne la rendons pas exclusive. En d’autres termes, ne passons pas une fois encore à côté du conflit en posant la mauvaise question.

Dès lors, la situation appelle une réaction forte et immédiate de condamnation des actes, puis une réflexion et une action des pouvoirs publics sur le long terme, dans quatre domaines principalement : la lutte contre l’exclusion sociale et les discriminations, qui – on ne le dira jamais assez – sont des morts sociales ; la nécessaire promotion, sur le plan républicain, de l’égalité et de l’équité ; une pro-activité gouvernementale sur la question du Proche-Orient ; une évolution du traitement de l’islam et du monde musulman par les médias.

Sur le terrain social, dans le contexte actuel de crise, il faut porter une attention particulière aux populations issues de l’immigration, montrer que l’État est attentif à faire en sorte que leur souffrance soit semblable à celle des autres, c’est-à-dire ni plus ni moins grande, et ne pas relâcher la lutte contre les discriminations.

Sur le terrain de la République, islamophobie et antisémitisme sont les deux faces d’une même médaille. Frantz Fanon disait : « Quand vous entendez dire du mal des juifs, dressez l’oreille : on parle de vous. »

Dans notre République, toute insulte communautaire est une insulte à l’ensemble de la communauté nationale. Toute profanation de mosquée, de synagogue, d’église ou de tombe est une atteinte à la République, à notre lien social, à notre nation. Doit-on instaurer une hiérarchie dans l’indignation en mobilisant plus de moyens dans un cas que dans un autre ? Non ! Il est important de faire preuve d’équité dans la compassion, sous peine d’aider au développement d’un sentiment d’injustice. Il y va de la cohésion nationale.

La République que je soutiens, c’est celle qui traite ses enfants de manière égale. Dans ce domaine, ce n’est pas toujours le cas. Nous l’avons vu lors de la profanation des tombes musulmanes du cimetière militaire de Notre-Dame-de-Lorette, perpétrée à l’occasion de la plus importante fête canonique musulmane : la République a été absente.

En tant que républicains, nous avons plus que jamais l’obligation de promouvoir la laïcité, cet espace de concorde qui nous permet de vivre ensemble au-delà de nos différences.

Sur le terrain de l’action des pouvoirs publics, pour éviter d’importer le conflit, il faut d’abord le déconfessionnaliser et, surtout, le politiser. Cela a été souligné par plusieurs intervenants.

Une telle démarche exige par exemple de juger les actes, et non les acteurs, et de mettre à bas la « bien-pensance » qui immobilise nos élites de tous bords.

Juger l’armée israélienne ou le Hamas, ce n’est pas être antisémite ou islamophobe, c’est s’appuyer sur des faits et des données pour établir des responsabilités. Je réclame le droit à l’objectivité et à l’analyse sans être taxée d’antisémitisme. Le terrorisme intellectuel a vécu !

À ce titre, monsieur le ministre, la France, patrie des droits de l’homme, doit être au premier rang pour condamner l’impossibilité d’entrer dans la bande de Gaza pour les convois humanitaires et pour la presse, laquelle ne peut rendre compte de la situation, ce qui alimente toutes les rumeurs, ni établir la vérité, gage de la paix sociale. Comment peut-on laisser aussi silencieusement le gouvernement israélien bafouer le droit ?

Cela veut-il dire que la France ne commencera à s’inquiéter que lorsque l’armée israélienne emploiera des moyens encore plus terribles ? La diplomatie n’empêche pas la fermeté. On est davantage pris au sérieux quand on est ferme. De surcroît, au moment où les populations civiles de Gaza sont sous les bombes, la Cisjordanie est témoin d’une colonisation massive. Doit-on l’oublier et jouer ainsi le jeu du gouvernement israélien actuel, en obérant les possibilités de paix futures ?

Comme cela a été souligné dans le débat, les armes se tairont peut-être après l’investiture du président Obama. En attendant, combien de morts civils, de femmes ou d’enfants tués dans cette prison à ciel ouvert qu’est Gaza ?

Les poètes Mahmoud Darwich et Edward Saïd me manquent. « Même le soleil ne se lève plus à Gaza sous les bombes. » En guise de lumière, ses habitants ont celle des bombes au phosphore blanc…

Monsieur le ministre, vous qui êtes le promoteur, le chantre du droit d’ingérence quand des atrocités sont commises, permettez-moi de vous interpeller : ce droit serait-il valable partout dans le monde, sauf pour le conflit israélo-palestinien ?

Nous avons le devoir de réagir avec intelligence, parce que des populations qui sont marquées par ce conflit vivent sur notre territoire. À ce titre, le rôle des médias dans la représentation tant des différentes communautés que du conflit est essentiel.

Rappelons une évidence : le processus de mondialisation concerne également l’information, ce qui fait que nos concitoyens ont accès aussi bien à internet qu’à des journaux étrangers. Ils déconstruisent l’information et portent de plus en plus un regard critique sur la manière dont les médias en France rendent compte du conflit. Le souci d’un traitement sobre, sans parti pris, doit animer les rédactions de l’ensemble de nos médias.

De manière plus générale, comme je l’ai déjà dit lors du débat sur l’audiovisuel public, je m’insurge contre le traitement de l’islam par les médias. Il est tout simplement révoltant que l’on invite à discourir sur l’islam à une heure de grande écoute des personnes ne parlant ni l’arabe ni le français – je les qualifierai d’ « analphabètes bilingues » – ou des wahhabites intransigeants, alors que nombre d’intellectuels, musulmans ou non, sont tout aussi capables d’évoquer cette question.

Quand on parle de l’islam dans ces termes, c’est de moi que l’on parle ! On méprise le téléspectateur, on renforce une vision stéréotypée sans montrer la diversité de la pratique et la réalité de cette religion, qui relève du socle abrahamique, comme le christianisme et le judaïsme. Pire, on conforte aussi bien l’islamophobie que l’islamisme radical dans leurs certitudes, ce qui peut jouer un rôle dans une éventuelle importation du conflit.

Je veux saluer ici toutes les organisations qui œuvrent pour la paix, notamment les organisations féminines composées de femmes palestiniennes et israéliennes, en particulier la Coalition des femmes pour une paix juste, la Coalition des pacifistes israéliens pour Gaza et le Collectif des femmes en noir, que nous avons rencontré au Sénat grâce au groupe CRC-SPG. Il faut du courage, dans cette région du monde, pour faire la paix, et ces femmes en ont.

Je conclurai, monsieur le ministre, en disant que la violence conduit à l’impasse.

Si les causes à l’origine de la violence dans cette région du monde ne sont pas traitées dans un processus raisonné, nous finirons inévitablement par être atteints. C’est pourquoi il nous faut continuer inlassablement, d’abord pour ceux qui subissent cette violence, ensuite pour nous-mêmes, à faire preuve d’exigence avec nos amis des deux bords, en tenant un discours de vérité et de courage.

Pour que le courage fasse école, monsieur le ministre, il faut que, sur cette question, la peur nous quitte. De part et d’autre, nous devons dépasser les réactions émotionnelles que nos origines nous imposent, pour ne voir que la justice et le droit. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG, ainsi que sur certaines travées du RDSE et de l’Union centriste.)

 

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FORUM DE LA RENOVATION DU PS – Janvier 2008

Forum de la rénovation du Parti Socialiste

Intervention de Bariza KHIARI

20 janvier 2008

 

Chers camarades,

Les allers retours entre libertés individuelles, droits et espaces collectifs ont été au cœur de nos débats au sein de la commission. La laïcité est au cœur de cette problématique, pourquoi ? Parce que c’est un principe émancipateur, essentiel à l’exercice des libertés individuelles. Parce que c’est un principe unificateur, essentiel à l’existence d’un espace collectif harmonieux.

Nous avons eu raison d’en parler au moment ou Nicolas Sarkozy nous lance un défi. Ce défi consiste en une remise en cause grave et sans précédent du principe de laïcité. Je ne reviendrai pas sur la hiérarchisation qu’il fait entre les monothéismes, Benoît Hamon a évoqué ce sujet. Dans ce domaine, il exclut et divise comme il a l’habitude de le faire et, aujourd’hui c’est entre les chrétiens, les musulmans et les juifs.
Après avoir tenté d’ethniciser la question sociale, Nicolas Sarkozy essaie aujourd’hui de la confessionnaliser. Ce n’est pas nouveau, durant les émeutes de 2005, il avait tenté d’en appeler aux imams pour apaiser les tensions sociales

Ce qui caractérise Nicolas Sarkozy, c’est : Cela ne se dit pas, alors je vais le dire, cela ne se fait pas, alors je vais le faire. Sauf qu’au Latran, il a franchi une ligne rouge en affirmant que dans l’apprentissage des valeurs, « jamais l’instituteur ne pourra remplacer le pasteur ou le curé…parce qu’il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d’un engagement porté par l’espérance». Cette transgression est une régression.

Par ces mots, il porte une atteinte sans précédent à la laïcité dont l’école républicaine est le lieu d’expression historique. Il laisse entendre que l’école laïque qui m’a permis, comme à beaucoup d’autres, d’enrichir et de dépasser une identité héritée, notre école aurait formé pendant des générations des individus sans vertu, incapable de distinguer le bien du mal. Pour nous, socialistes, la morale laïque est essentielle dans la construction d’un citoyen éclairé et autonome.

A tous ceux qui désespèrent de la baisse de leur pouvoir d’achat, du chômage, de l’absence de logement et qui ne demandent que le « pouvoir vivre », il leur propose un discours sur la transcendance et l’espérance.

En fait, Nicolas Sarkozy a pour projet de substituer à notre République laïque une « politique de civilisation » faites : de lois liberticides, de statistiques ethniques, de fichage génétique et de précarisation de notre modèle social. C’est l’avant-poste en Europe des néo-conservateurs américains.

A dessein, il mélange : spiritualité et religion. Si à titre personnel, je pense que le besoin de spiritualité est inhérent à la nature humaine, je pense aussi que ce besoin de spiritualité ne passe pas forcément par les religions. Il y a bel et bien un humanisme laïc.

La grande question selon Nicolas Sarkozy serait, parait-il, de tenir compte des musulmans de France. Après avoir parlé de « karcher », « de racaille », « de moutons égorgés dans la baignoire »….. il s’inquièterait des musulmans de France !!!

Je ne sais pas ce que vous en pensez mais moi, mes camarades, quand la droite a ce type d’inquiétude, je commence à me méfier. Finalement, est-ce que les musulmans de France ne seraient pas pour Nicolas Sarkozy le paravent qui cache la fin du principe de laïcité et ainsi, la porte ouverte à divers mouvements sectaires ? On peut quand même s’interroger…

Puisque certains posent avec insistance la question de l’Islam et de sa fongibilité avec la République : nous devons y répondre avec clarté. Je remercie la commission d’avoir débattu de cette question. C’est extrêmement important.

Non, il n’y a pas plus, ni moins d’incompatibilité entre l’Islam et la République laïque qu’entre les autres religions et la République ! S’il y avait eu compatibilité entre le catholicisme et la République, il n’y aurait pas eu de loi de séparation. Il n’y a pas d’incompatibilité dès lors que la République installe un cadre rigoureux, dès lors qu’elle ne transige pas sur ses principes fondateurs. La loi sur les signes religieux à l’école en est le meilleur exemple. Aujourd’hui, no problème…

La rareté de lieux de culte pour les musulmans pose des problèmes à ceux qui souhaitent pratiquer dignement leur foi. Nous n’allons pas le nier mais, le principe de laïcité n’est pas un obstacle à la création de nouveaux lieux de culte.

Je vais évoquer Paris puisque c’est ce que je connais le mieux. La politique menée, en la matière, par Bertrand Delanoë est exemplaire, puisqu’elle concilie les impératifs de laïcité et de diversité dans le strict respect de la loi de 1905. – En accordant les permis de construire refusés par la droite et Mme de Panafieu ne manque pas d’air en proposant la construction d’une grande mosquée à Paris après le refus constant de délivrer des permis de construire par son camp politique. En mettant à disposition des salles pour les fêtes canoniques, en créant un Institut de culture de l’Islam la municipalité marque son intérêt et son respect pour la culture de l’ensemble des parisiens sans distinction. Cette politique s’est caractérisée par un dialogue constant avec les populations et par des gestes nombreux qui incluent les musulmans dans l’histoire et la mémoire de Paris. Ce qui est très important, c’est de marquer du respect. Cela prouve que le plus souvent les obstacles mis à l’édification d’un lieu de culte sont plus de nature politique que juridique.

Mes camarades,

La diversité et l’acceptation de l’Islam sont le test de crédibilité de notre République laïque. Nous devons être capables de lutter contre l’instrumentalisation de la religion à des fins politiques sans stigmatiser les musulmans, et donner à chacun les moyens d’exercer dignement sa pratique religieuse sans transiger sur la laïcité. La ligne de conduite qui doit être la nôtre est aussi simple sur le plan théorique qu’elle est exigeante dans la pratique Je voudrais citer cette belle formule de Ghaleb Bencheikh que la commission a auditionné : « Il faut que la loi puisse préserver la foi aussi longtemps que la foi ne prétend pas dire la loi ». Mes camarades, les musulmans de France ont surtout besoin d’être considérés comme citoyens à part entière, et non comme des citoyens à part.

Nous avons également réaffirmé dans notre commission le fait que la République n’est pas seulement une forme de régime politique. Elle est un corpus de principes, de valeurs. Elle est surtout un projet. Affirmer que la République a besoin de croyants convaincus, c’est nier la valeur de ce projet. Notre République laïque a besoin de citoyens égaux qui bâtissent ensemble leur avenir. L’espérance ne doit pas être laissée aux religions : c’est la négation même de tout projet politique. Notre plus grande espérance est dans le projet républicain, ici et maintenant.

Je vous remercie.

 

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Pour une nouvelle géopolitique de la Méditerranée

La diabolisation de l’islam est une impasse par Bariza Khiari

Tribune parue dans Le Monde, édition du 9 avril 2011

Nicolas Sarkozy avait voulu faire de l’Union pour la Méditerranée (UPM) un élément essentiel de la crédibilité internationale de la France, notamment dans son « dialogue » avec les pays du Sud. Après deux ans d’errements et d’improvisations, cette institution a montré ses limites. Ce fiasco était prévisible. Dès sa conception, l’UPM souffrait de trois grands paradoxes.

La première contradiction réside dans la méthode : à vouloir faire cavalier seul et s’attribuer la réussite du projet, le président s’est disqualifié en ne jugeant pas nécessaire de convaincre ses partenaires européens, et en particulier l’Allemagne, de la pertinence de l’enjeu méditerranéen. Cette obsession à tout s’approprier, à faire des coups médiatiques au détriment d’une véritable politique, est contraire à l’intérêt général.

Deuxième paradoxe : la politique intérieure du gouvernement s’oppose à un projet méditerranéen. N’est-il pas en effet contradictoire de parler d’« union de projets », de « dialogue des civilisations », de « ponts à construire », tout en s’érigeant en citadelle ? La énième loi sur l’immigration contribue, une fois encore, à faire de l’étranger un délinquant.

Au-delà de la question migratoire, comment nouer une alliance fondée sur la confiance avec ces pays tout en stigmatisant, jour après jour, les Français de tradition arabo-musulmane qui vivent sur votre sol ? Ceux-là mêmes qui possèdent toujours des liens très forts avec l’autre rive. La refondation de l’UPM va percuter, avec fracas, le débat voulu par le parti du président sur – ou plutôt contre – l’islam.

Car, en France, le musulman est devenu la nouvelle figure de l’Autre. Les petits fils d’immigrés, nés français, sont désignés comme « musulmans » pour mieux les enfermer dans une identité allogène et forcément pathogène. Pour Nicolas Sarkozy, le musulman devient, face à la surenchère électoraliste imposée par le Front national, un enjeu qu’il suffirait de triturer habilement pour en faire une martingale en vue des prochaines élections.

Défiance grandissante

Sa croisade a commencé dès 2007, elle s’est poursuivie avec la création du ministère de l’identité nationale et du funeste débat du même nom, avant de se décliner dans des polémiques autour de la burqa, des minarets et de la nourriture halal. C’était faire injure à ces millions de citoyens qui vivent leur foi en toute discrétion et tranquillité, en parfaite cohérence avec la laïcité.

Cette diabolisation de l’islam, ces éructations répétées contre une foi et une spiritualité sont contraires à notre conception de la laïcité et constituent autant d’humiliations aux conséquences corrosives pour le vivre-ensemble et l’image de la France. Faut-il rappeler que les jeunes de la rive sud vivent la démocratie par procuration en suivant avec avidité la vie politique française ? Les propos, agissements et décisions de nos responsables sont commentés en temps réel sur les réseaux sociaux, dont on connaît le rôle déterminant dans le déclenchement du « printemps arabe ».

Le troisième paradoxe repose sur une erreur majeure dans l’analyse de l’évolution politique des pays de la rive sud. Obsédé par l’intégrisme, le gouvernement français a cautionné la privation des libertés dans les pays du Sud en soutenant des régimes autoritaires et déconnectés des peuples. D’ailleurs, la France, et elle n’est pas la seule en Europe, s’est faite la complice de la théorie selon laquelle la foi musulmane serait incompatible avec la démocratie. Aujourd’hui, cette vision fantasmée et anxiogène de l’islam et des musulmans justifie, dans les pays du Sud, une défiance grandissante à l’égard de la France.

En définitive, l’Union pour la Méditerranée est une belle idée gâchée qu’il faudra nécessairement repenser. La vision française sur le sujet, en plus d’être paradoxale, est schizophrène : elle est lyrique et grandiloquente dans ses discours, et paranoïaque dans ses actes. La dichotomie entre politique intérieure et politique étrangère n’est plus acceptable.

Dans l’immédiat, il est indispensable de soutenir les sociétés civiles de la rive sud qui expriment avec une vitalité et une conviction insoupçonnées leurs aspirations démocratiques. Il convient de leur proposer les outils de cette émancipation afin qu’elles s’approprient les processus démocratiques en renforçant les mécanismes de financement européens dédiés.

Enfin, il est urgent et salutaire d’ouvrir une séquence positive avec nos citoyens de tradition arabo-musulmane car ils seront les meilleurs passeurs vers la rive sud.

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Question d’actualité au Gouvernement sur la laïcité et le discours de Latran de Nicolas Sarkozy

Séance publique du Sénat – Question d’actualité au gouvernement

Défense de la laïcité

Intervention de Mme Bariza Khiari

Mercredi 16 janvier 2008

 

Mme Bariza Khiari. Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, la rupture, la fin des tabous ne sont pas en soi synonymes de modernité. Au Latran, le Président de la République a franchi une ligne rouge en affirmant que, dans l’apprentissage des valeurs, « jamais l’instituteur ne pourra remplacer le pasteur ou le curé ».

M. Jacques Mahéas. C’est scandaleux !

Mme Bariza Khiari. Cette transgression est, pour nous, une régression. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Par ces mots, le Président de la République porte une atteinte sans précédent à la laïcité (Protestations sur les travées de l’UMP), dont l’école républicaine est le lieu d’expression historique. Il laisse entendre que l’école laïque, qui m’a permis, comme à beaucoup d’autres, d’enrichir et de dépasser une identité dont j’ai hérité, aurait formé pendant des générations des individus sans vertu, incapables de distinguer le bien du mal. (Nouvelles protestations sur les travées de l’UMP.)

M. Christian Cambon. N’importe quoi !

Mme Bariza Khiari. La morale laïque est essentielle pour la construction d’un citoyen éclairé et autonome.

Auriez-vous pour projet, monsieur le Premier ministre – ma question s’adressait à lui -, de substituer à notre République laïque une « politique de civilisation » faite de lois liberticides, de statistiques ethniques, de fichage génétique et de précarisation de notre modèle social ?

À tous ceux qui désespèrent à cause de la baisse de leur pouvoir d’achat, du chômage, de l’absence de logement et qui ne demandent que le « pouvoir vivre », vous proposez, pour éviter la confrontation au réel, un discours sur la transcendance et l’espérance. Mais notre plus grande espérance, c’est la République, ici et maintenant !

Pour contourner la question sociale, vous avez essayé de l’ethniciser. Aujourd’hui, vous tentez de la confessionnaliser.

M. Alain Gournac. La question !

Mme Bariza Khiari. Lors des émeutes de 2005, le ministre de l’intérieur de l’époque avait tenté de s’en remettre aux imams. Il y a bien là une constante !

Cette attaque idéologique prépare-t-elle des modifications législatives ou réglementaires ? La réponse faite par Mme Alliot-Marie à M. Christian Bataille, à l’Assemblée nationale, nous inquiète.

Sans modifier la loi de 1905, il est déjà possible d’intégrer des espaces funéraires musulmans. Cela se fait dans beaucoup de communes. En ce domaine, les problèmes sont davantage de nature politique que de nature juridique, et vous le savez bien. Si votre intention est de tenir compte des musulmans de France, sachez qu’ils ont surtout besoin d’être considérés comme des citoyens à part entière, et non comme des citoyens à part.

Notre conception de la laïcité n’est pas intolérante, elle est libératrice. Notre laïcité est le meilleur garant de la diversité, de la mixité et de l’émancipation des femmes.

J’en viens à ma question. (Ah ! sur les travées de l’UMP.)

Au motif d’aménagements techniques, comptez-vous, par la voie réglementaire, réformer le statut des associations cultuelles et modifier l’article 2 de la loi de 1905 ? (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

 

Réponse du Secrétariat d’État aux Relations avec le Parlement

publiée dans le JO Sénat du 11/01/2008

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement. Certes, monsieur Bodin ! Mais tout va bien, ne vous inquiétez pas !

Madame la sénatrice, je souhaite, tout d’abord, vous présenter les excuses de M. le Premier ministre, qui ne peut être présent parmi nous aujourd’hui.

Vous le savez, madame Khiari, de nombreux membres du Gouvernement sont issus de l’école publique, laïque et républicaine !

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Ils ont eu de mauvaises notes ! (Sourires.)

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Plusieurs d’entre eux sont même d’anciens inspecteurs généraux de l’éducation nationale – n’est-ce pas, monsieur Darcos ? -, qui ont défendu la laïcité avec force.

M. Paul Raoult. Raison de plus pour ne pas la casser !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Par conséquent, sur ce sujet, il convient de rester mesuré.

En vérité, et vous le savez bien, la loi de 1905 a été modifiée et aménagée une douzaine de fois, par des gouvernements de gauche comme de droite. Il n’existe donc pas, en la matière, de règle préétablie.

Pour autant, le Président de la République a dit clairement, et il l’a encore répété hier,…

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Il a dit tellement de choses !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État…. que la loi de 1905, dans ses principes, ses fondements et ses équilibres, ne serait pas modifiée, même si des aménagements techniques pouvaient intervenir.

Vous avez évoqué le problème des carrés confessionnels. Mme le ministre de l’intérieur a mis en place un groupe de travail qui réfléchit sur ce sujet en particulier et sur un certain nombre d’autres.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. Un groupe de travail… et on pense que c’est réglé !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Vous avez raison de dire que la solution de ce problème dépend des communes. Mais, en disant cela, vous reconnaissez vous-même que c’est en fonction de la bonne volonté des communes que certains obtiennent satisfaction ou non.

Ne suffit-il pas simplement de prévoir des aménagements afin qu’une même règle s’applique dans l’ensemble du pays ? C’est ce type de mesure qui peut être envisagé par rapport à la loi de 1905.

Personne ne souhaite remettre en cause la laïcité, qui est le fondement du système mis en place dans notre pays.

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. C’est vous qui le dites !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Pour autant, cessons d’avoir, sous couvert de laïcité – et je ne vous vise pas, madame Khiari -, une vision parfois intolérante.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Merci !

M. Roger Karoutchi, secrétaire d’État. Il faut respecter ceux qui croient et ceux qui ne croient pas, car même ceux qui ne croient pas ont des convictions.

La tolérance consiste aussi à accepter ceux qui croient, à les laisser s’organiser et être ce qu’ils sont. (Très bien ! sur les travées de l’UMP. – Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC.)

Mme Nicole Borvo Cohen-Seat. La laïcité est tolérante !

M. Roger Karoutchi, secrétare d’État. Un peu d’ouverture d’esprit ainsi qu’une vraie laïcité positive et apaisée ne nuisent pas ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées de l’UMP.)

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CONGRES DE DIJON – 2003

Lutter contre les discriminations politiques au sein du Parti socialiste

 Contribution thématique au congrès national du Parti Socialiste de Dijon

 Mai 2003

 Face aux dangers que représentent les discriminations pour la cohésion sociale, il devient urgent de donner à chacun, selon sa spécificité, ses racines et son histoire personnelle, l’assurance de pouvoir jouer pleinement son rôle dans la société.

Réfugiées dans l’abstention, dispersées vers les listes d’une gauche radicalisée, rétractées dans le vote FN, troublées par le coup de tonnerre du premier tour des présidentielles, les couches populaires nous ont durement sanctionnés. Certains ne veulent y voir qu’une inexplicable ingratitude à laquelle l’Histoire rendra bientôt justice. Mais cette stratégie d’évitement, adossée à la liste si souvent répétée des réformes positives de la gauche au pouvoir, accentue encore la fêlure qui nous a entraînés dans la spirale de l’échec. Il ne resterait donc plus comme alternative, sauf à sombrer dans l’opportunisme, qu’à persévérer en attendant que la politique antisociale de la droite révèle la justesse de nos orientations.

Pourtant, l’occasion nous est donnée par ce congrès de crise refondatrice de repenser la réalité sociale, les phénomènes de fragmentation sociale, culturelle et ethnique, produits en partie par notre incapacité à penser, représenter et traiter la diversité. Dans un contexte de crise sociale dans laquelle les repères traditionnels semblent inopérants, la pratique courante des discriminations agit comme un élément d’aggravation de la dissolution du lien social. Absents de la représentation nationale et invisibles au sein du Parti socialiste, les Français issus de l’immigration ou originaires d’Outre-mer subissent une double peine : illégitimes socialement et illégitimes politiquement.

Cette contribution a pour ambition de replacer ce constat dans son contexte social et d’appeler notre parti à s’acquitter des tâches qu’exigent ses valeurs.

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CONGRES SOCIALISTE DE REIMS – 2008

Contribution thématique

LA FRANCE EST EN NOUS /  CONGRES DE REIMS / 2008

de Bariza KHIARI et de Fayçal DOUHANE

Dimanche 20 juillet 2008

 

Nous sommes les héritiers de Montaigne et d’Averroès, de Voltaire et de Césaire. Nous sommes les enfants de l’Histoire de France. Et pourtant, pour certains, nous restons « Beurs, Blacks, jeunes-de-banlieue, issus-de-l’immigration, minorités-visibles ». Pour d’autres, « Arabes, musulmans, voire Indigènes ou encore racailles ». Tant de mots et d’expressions pour nommer une même réalité : la différence d’origine, de couleur, de religion. Positifs ou péjoratifs, aucun de ces termes n’est neutre et chacun d’eux vise à singulariser une partie de la population française. Aujourd’hui, on nous appelle « les-issus-de-la-diversité ». Parce que nous refusons cette assignation, fût-elle sémantique, parce que nous croyons encore à la dynamique fondée sur le mérite et en la promesse républicaine d’égalité, parce que sommes avant tout des socialistes, nous revendiquons le droit à l’inclusion au cœur de la Nation et notre place en son sein.

Nos papiers, nos familles, nos avenirs sont français, mais avoir un ascendant arabe, africain ou asiatique nous fait toujours obligation de rappeler notre identité sur plusieurs générations. On a multiplié les nuances et les périphrases pour masquer cette réalité. Jusqu’à l’absurde. Paroxysme de l’hypocrisie, en France, les « jeunes des banlieues » ne désignent pas une classe d’âge, mais une origine ethnique ! Le temps n’y a rien changé. Arrière petit-fils de tirailleur sénégalais, petite-fille d’ouvrier algérien, jeune créole de Pointe-à-Pitre… nous avons hérité de la couleur et du patronyme de nos aïeux. Or cela fait de nous, à ce seul titre, l’étranger, l’Autre.

Au fil du temps, nous avons fini par intégrer cette altérité. C’est pourquoi notre rapport à la Nation peut paraître aussi complexe. En effet, ce « marquage » des origines crée et alimente un malaise, une ambiguïté identitaire. Nés en France de parents Français, certains parmi nous en sont venus à ressentir la nostalgie de l’exilé envers un pays dont ils ne connaissent pourtant rien. Ils se perçoivent comme des « immigrés de l’intérieur ». Par dépit, ils ont choisi d’entretenir cette singularité en se nommant les « indigènes » et à nommer l’autre « gaulois » ou « céfrancs ».

Nous avons hérité de nos parents une langue et une culture. Nous avons pu les accepter, vouloir les transmettre à notre tour ou les dépasser. Les situations sont diverses et nuancées et dépendent beaucoup de nos histoires personnelles. Tous, nous portons en nous les ingrédients d’identités plurielles et polychromes ; nous vibrons au récit de la victoire de Valmy et tremblons à celui du massacre de Sétif. Qu’une loi reconnaisse les bienfaits de la colonisation, et notre sang ne fait qu’un tour ; qu’une loi règlemente les signes distinctifs à l’école, et nous sommes en première ligne pour la soutenir. Nous sommes les enfants de la Laïque. Mais on cherche toujours à nous placer sur un curseur allant d’« étranger » à « Français ». Et tous les noms dont on nous affuble sont l’échelle de ce curseur. Combien de temps faudra-t-il encore avant que nous puissions tout simplement être Français ?

Nous croyons profondément aux principes des Lumières et de la Révolution Française. Il y a bientôt 220 ans, le Tiers Etat réuni en Assemblée Nationale rédigeait la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen. Nous ne l’oublions pas. Des hommes et des femmes qui venaient de renverser la tyrannie de l’Ancien Régime posaient les principes qui gouvernent toujours notre République. Une conception nouvelle de la Nation venait de s’affirmer, fondée sur l’égalité des citoyens, par-delà leur origine, leur couleur, leurs opinions ou leur religion.

La mise en œuvre de cette déclaration de principes aura été longue et difficile. Il aura fallu de nombreuses années de luttes pour réduire le fossé entre les principes et la vie réelle. Républicanisme, mouvement ouvrier, combat laïc, féminisme, anti-colonialisme … Tous ces combats auront été nécessaires pour que prenne forme la promesse de 1789. Mais l’égalité réelle n’est jamais acquise, le combat reste inachevé : il doit toujours être recommencé et approfondi. Notre travail sur la question des discriminations s’inscrit dans la continuité de ces combats. Rejetés aux marges de la nation, « les divers, les minoritaires, les issus-de-… » sont plus facilement et plus naturellement victimes de discriminations.

En cela, nous voulons poser clairement la question nationale. La Nation est aujourd’hui – à tort – un thème mal aimé à gauche. Trop longtemps, nous en avons laissé le monopole à l’extrême droite, puis à Nicolas Sarkozy. En abandonnant la question de l’identité nationale aux démagogues et aux tenants du tout sécuritaire, nous avons failli à la mission historique de la gauche.

Être français : une évidence et un questionnement

Face à toutes ces bonnes âmes qui prétendent respecter l’autre en le nommant contre son gré, nous préférons ne voir que des citoyens français. Alors que pour certains à gauche, la nation semble être devenue une question taboue, nous voulons réaffirmer notre appartenance à la nation française et notre fidélité à ses valeurs républicaines d’égalité et d’émancipation.

La droite veut aujourd’hui nous imposer une vision réactionnaire et étriquée de la nation. Le lien entre immigration et délinquance est systématiquement entretenu par Nicolas Sarkozy ; la création d’un ministère associant immigration et identité nationale dénote clairement la volonté de stigmatiser tous ceux qui, à des degrés divers, ne correspondraient pas à l’ADN du « bon Français ». La multiplication de ces discours d’exclusion vise avant tout à segmenter la société, pour masquer les ravages des politiques libérales, en opposant les français entre eux.

Le Parti Socialiste doit combattre l’offensive idéologique de la droite visant à imposer, par des procédés insidieux, une conception essentiellement ethnique et religieuse de la Nation française. Le discours du Latran, les attaques répétées contre la laïcité notamment contre la loi de 1905, les statistiques ethno-raciales témoignent de cette conception. Il nous faut dénoncer et rejeter l’alignement, au plus haut niveau de l’Etat, sur la doctrine guerrière des néo-conservateurs américains. Face à ce discours qui sème la division et qui fait de nous des Français suspects, la gauche doit porter sa vision républicaine, universaliste et confiante de la Nation. Dans un monde globalisé, nos identités tendent à devenir transfrontalières. Parce que l’identité moderne est complexe, il faudra désormais admettre et faire comprendre qu’on peut aimer la France, être citoyen français et assumer la plénitude d’une identité plurielle.

Dans notre réponse aux discours de la droite, nous sommes restés dans l’ordre du symbole. Or, la Nation ne se résume pas à un drapeau accroché à une fenêtre ou à une Marseillaise entonnée dans les écoles. La Nation est l’essence même de ce qui permet au citoyen de se construire et de jouer pleinement son rôle au sein de la collectivité. Autour d’elle s’articulent les grandes problématiques de notre époque :

Qu’est-ce qu’être Français en France ? Comment voulons-nous vivre ensemble ?

Qu’est-ce qu’être Français en Europe ? Quelle Europe voulons-nous ?

Qu’est-ce qu’être Français dans le monde ? Quel rôle voulons-nous tenir dans la mondialisation ?

Dans un univers globalisé en quête de repères puissants, le questionnement sur l’identité nationale est légitime. Mais, il ne doit pas être laissé à la seule droite conservatrice, ni lié à la thématique de l’immigration. Au contraire, la gauche a historiquement défendu et promu une autre idée de la Nation, transcendant les identités héritées, faisant de la promesse républicaine un lien plus puissant que la somme des origines.

La République : un espoir trop longtemps déçu

Si la définition d’Ernest Renan de la nation comme « plébiscite de chaque jour » n’a rien perdu de sa beauté, elle peine néanmoins à trouver prise dans un monde hanté par le fantasme délétère du « choc des civilisations ». Dès lors, le simple rappel et la seule incantation des principes républicains d’égalité et d’universalisme ne suffisent plus. Toute la promesse républicaine tenait déjà dans cette formule de Gambetta : « La République, ce n’est pas de reconnaître des égaux, mais d’en faire ». Pour redonner sens à ce projet politique, pour que les identités héritées ne se transforment pas en « identités meurtrières », nous devons, par des politiques concrètes, redonner tout son sens à cette injonction en façonnant les nouveaux outils de l’égalité républicaine. Nous voulons de nouveaux hussards pour la République de demain. Mais nous voulons que ces hussards puissent être noirs de peau.

Français, nous le sommes en droit certes, mais les faits sont têtus et parlent cruellement. Les discriminations subsistent et frappent de plein fouet ceux qui sont déjà les plus défavorisés socialement. Pour les classes populaires, les humiliations sont quotidiennes. Notre combat n’est ni communautaire, ni identitaire, il est républicain.

Pour beaucoup d’entre nous, l’arrivée de Jean-Marie Le Pen au second tour de l’élection présidentielle de 2002 et les émeutes de novembre 2005 ont été un traumatisme. Ces évènements nous ont aussi rappelé notre propre échec : celui de l’anti-racisme militant des années 80, celui des tentatives des premières générations pour s’intégrer dans le champ politique. Ces tentatives nous ont justement ramenés à la faillite même du concept d’intégration, nous rappelant combien nous avons été dupes des politiques et de nous-mêmes.

Au final, la Marche pour l’Egalité et le combat anti-raciste des années 1980 ont débouché sur une impasse politique. Ce combat n’a fait ni reculer l’extrême droite, ni même améliorer concrètement la situation de plusieurs générations. Déjà à l’époque et au grand dam de ses participants, la mobilisation avait été rebaptisée « Marche des Beurs », ce qui revenait à donner une connotation ethnique à une démarche avant tout politique et citoyenne. L’antiracisme était devenu la bonne conscience de la gauche. Aucun réel progrès n’était au rendez-vous. Des millions de personnes tentent aujourd’hui encore mais en vain, non pas de s’intégrer, mais d’être reconnues en fonction des seuls critères de mérite et de compétence. Nous payons aujourd’hui la somme des échecs d’hier.

Du paradigme de l’intégration à celui d’égalité républicaine

Nous avons assumé ces erreurs passées et essayé de donner un souffle nouveau au combat pour l’égalité. Nous avons proposé d’abandonner le paradigme pernicieux de l’intégration, pour lui préférer celui de l’égalité républicaine. Certains continuent à nous parler d’intégration, à nous qui sommes souvent nés en France et qui n’avons jamais vécu ailleurs. Le paradoxe est cruel : comment s’intégrer à une communauté nationale à laquelle on est déjà supposé appartenir, du moins en droit ? Serions-nous « moins égaux que les autres », pour devoir nous intégrer ? Il aura fallu bien des années de combat pour dissiper cet écran de fumée de l’intégration et replacer le débat sur le terrain de l’égalité.

Combien d’années faudra-t-il encore pour convaincre que la promotion de la diversité n’est pas une question ethnique, mais d’abord une question sociale ? Certes, la prise de conscience de l’enjeu que constituent les discriminations est réelle, et nous ne pouvons que nous en réjouir. Dans notre Parti, grâce à quelques précurseurs, les progrès sont incontestables. Depuis les congrès de Dijon et du Mans, nous avons inscrit la lutte contre les discriminations et l’exigence de diversité parmi nos priorités. Les dernières élections municipales ont montré que la diversité est de mieux en mieux respectée dans les scrutins de liste. Les exécutifs de gauche reflètent davantage la société française. Cependant, beaucoup de travail reste à faire sur la visibilité. Parallèlement, la société civile s’est saisie de cet enjeu de la diversité et les clubs de réflexion, les colloques, les actions pédagogiques se sont multipliés. Mais, dans les quartiers populaires, les discriminations continuent à gangrener le corps social parce que les « issus de la diversité » sont perçus et placés aux marges et non au cœur de la Nation.

C’est en déconstruisant méthodiquement la vision ethnique de la droite sur la Nation que nous ferons revivre le souffle de 1789. Le Parti socialiste doit s’atteler à ce travail de fond s’il veut redevenir un grand parti d’émancipation, attentif au sort des classes populaires et préoccupé par cette problématique fondamentale. La diversité est donc avant tout un impératif de cohésion sociale. Si elle devient réalité, si elle s’applique à toutes les catégories de la population, elle sera source d’un sens civique renouvelé. Faute de quoi, notre pacte républicain s’effritera insidieusement et nous serons confrontés inévitablement un jour à la question raciale, comme l’est aujourd’hui, malgré lui, Barack Obama, dans une nation américaine déchirée par les inégalités sociales.

Re-poser la question sociale

La promotion de la diversité n’est pas notre horizon unique. Notre combat est d’abord celui de la mixité et de l’ascension sociale. Notre travail sur le terrain a fait de nous les témoins impuissants de la précarisation croissante de notre société, de l’angoisse quotidienne des familles pour l’avenir de leurs enfants, la santé, ou le pouvoir d’achat.

Si nous acceptons sans réagir la mort sociale de certains territoires de la République, nous connaîtrons de nouveaux soubresauts et de nouvelles tensions. Pour lutter contre les identités meurtrières, contre la double désagrégation du lien social et du lien citoyen, l’égalité et la diversité ne doivent plus seulement être des mots mais des actes.

Les gouvernements de droite ont mis la question sociale au rebut, préférant analyser la société au prisme du libéral-communautarisme. Aujourd’hui, nous devons affronter la réalité sociale la plus crue et la plus douloureuse : si les quartiers ont déjà explosé et si cela peut se reproduire à tout moment, c’est en raison de la grande pauvreté qu’on a laissé s’y développer.

Alors que certains tentent d’ethniciser la question sociale à travers la légalisation de statistiques ethno-raciales, nous devons nous confronter à d’autres chiffres, bien plus éclairants : ceux de la réalité sociale des quartiers populaires : urbanisme aliénant, ghettoïsation, logements dégradés, chômage de masse, précarisation de l’emploi, discriminations répétées, délitement des liens sociaux et familiaux … tous les indicateurs annonçaient l’embrasement. Dès lors, comment s’étonner que la violence économique ait de telles répercussions et se transforme en émeutes et en violence autodestructrice ?

Cette question sociale, qui se posait avec tant d’acuité dans les quartiers populaires, s’étend progressivement aux classes moyennes. Les attaques répétées contre les services publics, les coupes claires dans les prestations familiales et sociales, les hausses incontrôlées des prix de l’énergie, de l’alimentation ou du logement … tout cela concourt à une paupérisation de la société française. La dégradation des conditions de travail est, elle aussi générale. Face à cette tragédie sociale, le politique doit reprendre sa place, et affronter les difficultés, sans chercher de dérivatif dans la démagogie ou le populisme. Nous devons affirmer avec force notre attachement aux mécanismes de l’Etat-providence qui sont battus en brèche chaque jour un peu plus. Les systèmes de protection collective et nos services publics sont le capital de ceux qui n’en ont pas.

Le Parti Socialiste constituera une alternative crédible s’il prend réellement conscience qu’une nation ne sera jamais plus forte que son maillon le plus faible. Avant d’être une « terre à problèmes », les banlieues sont avant tout les territoires de femmes et d’hommes à connaître et à reconnaître. Il est donc urgent de bâtir notre projet en direction des plus défavorisés de nos concitoyens et notamment vers ceux des quartiers populaires qui recèlent tant de dynamisme, d’énergie et de créativité. L’air du temps et la « gouvernance émotionnelle » ne constituent pas une politique.

Outre ce travail sur notre projet, nos succès lors des derniers scrutins locaux nous obligent dès aujourd’hui à l’action. Dans toutes nos collectivités territoriales, nous avons un véritable devoir d’exemplarité. De nombreuses expériences locales valident déjà notre projet. Nous devons les pérenniser et les généraliser. La lutte pour l’égalité réelle ne se jouera pas seulement à l’échelon national. Elle sera d’abord locale.

Quel modèle pour demain ?

Notre société serait condamnée à choisir entre l’universalisme républicain et le multiculturalisme. Cette alternative est une impasse. Notre modèle républicain reste encore la meilleure garantie de l’émancipation sociale, le meilleur rempart contre toutes les inégalités. Nous devons toutefois reconnaître lucidement les failles du « modèle ». Etre authentiquement républicain aujourd’hui, ce n’est pas prêcher la conservation d’un modèle dont chacun reconnaît les insuffisances.

La République n’est pas un dogme, elle est un projet toujours perfectible. Tout en restant fidèles à nos convictions et à nos principes, nous devons revivifier et faire réellement vivre ce modèle, pour qu’enfin la promesse républicaine redevienne crédible. C’est ce travail en profondeur, à la fois sur l’héritage républicain et sur son inclusion dans la modernité, qui nous permettra de mieux répondre aux questions que nous estimons majeures et parmi celles-là :

Qu’est-ce qu’être Français en France ? Parce que la France est en nous, nous voulons construire son avenir. Nous croyons que le Parti socialiste doit porter une nouvelle conception du vivre-ensemble. Cette conception doit se fonder sur un examen lucide de notre Histoire, notamment coloniale, et sur un véritable diagnostic des réalités sociales. A cet effet, il devra proposer des solutions adaptées pour réduire les inégalités et éradiquer toutes les discriminations.

Qu’est-ce qu’être Français en Europe ? Parce que la France est en nous, nous voulons l’Europe sociale. Nous croyons que pour aboutir à l’union des peuples européens à laquelle nous aspirons, nous devons proposer des alternatives aux politiques ultra-libérales des droites européennes : des institutions plus démocratiques, une harmonisation des politiques fiscales et sociales et un engagement concret en faveur du développement durable et solidaire.

Qu’est-ce qu’être Français dans le monde ? Parce que la France est en nous, nous la voulons exemplaire dans le monde. Nous croyons que le modèle républicain revivifié doit redevenir symbole d’émancipation. Nous croyons aussi que le principe de laïcité reste l’une des meilleures garanties de cette libération des Hommes. Nous voulons que la République Française soit irréprochable dans son action internationale et que ses valeurs universalistes la conduisent à refonder ses relations avec les pays du Sud, sur des bases de solidarité.

Parce que socialistes, nous sommes de la couleur de ceux qu’on discrimine. Parce que socialistes, nous devons porter l’espoir de ceux qui souffrent.

Pour eux, il est temps de proposer une vision de gauche authentique qui leur accorde enfin la place qui leur revient dans la communauté nationale. Il est temps pour nous de clarifier notre dessein pour la Nation. Il est temps de nous rassembler et de travailler dans un esprit de fraternité à un projet crédible et ambitieux pour la République de demain. Nous plaçons tous nos espoirs dans ce Congrès de 2008 pour qu’émergent enfin les conditions de l’alternance.

Premiers signataires : Bariza KHIARI, Sénatrice de Paris, Membre du Bureau national et Fayçal DOUHANE, Membre du Conseil National, Claude BARTOLONE, Président du Conseil Général de Seine Saint Denis, Député, Zorah AIT-MATEN, Déléguée nationale, 1ère Adjointe au Maire du 7ème arrondissement de Lyon, Razzy HAMMADI, Secrétaire national à la riposte, Beatrice ARRUGA, Vice-présidente de la région Centre, Adjointe au Maire de Vendôme Kofi YAMGNANE, Vice-Président du Conseil Général du Finistère, Pierre AIDENBAUM, Maire, Ali KISMOUNE, Délégué National, Séverine TESSIER, Commission Nationale des Conflits, Rachid MAMMERI, Conseiller Régional, Christophe ROUILLON, Maire, Membre du Conseil National, Nathalie BELLITY, Secrétaire Fédérale en charge des questions sociales et Présidente de l’Association C’la vie, Hamou BOUAKKAZ, Adjoint au Maire de Paris, Paul QUILES, Ancien Ministre, Monique CERISIER-BENGUIGUA, Sénatrice des Français de l’étranger Vincent LENA, Secrétaire national à la solidarité urbaine, Richard YUNG, Sénateur, Stéphane SAINT ANDRE, Maire de Béthune, Brigitte BOURGUIGNON, Conseil National, Adjointe au maire de Boulogne sur mer, Moncef JENDOUBI, 1er adjoint au maire ville de Boissy Saint Leger (94), Jérôme PASCO, 1er adjoint au Maire de Conches, secrétaire de section adjoint, Viviane PALUMBO, Secrétaire de la section Bessillon-canton de Cotignac, Pierre LEMAIRE, Kingston Jamaïque, Jean-Daniel CHAOUI, CA de la section de Madagascar, Bureau Fédéral de la FFE , Nadia TOUIZ, Mehdi OURAOUI, Responsable National à la citoyenneté, Faouzi LAMDAOUI, Secrétaire National à l’égalité, Tony DI MARTINO, Secrétaire Fédéral (93) ; Sajjad KHOKHAR, CA Bagnolet, Margarita MODRONO ZIN EL ABIDINE, Antoine HOME, Maire de WITTENHEIM, Conseiller Régional, Mathieu DURQUETY, Conseiller municipal, Bureau Fédéral, Mustapha AKSIL, Membre du Conseil National, Sanda RABBAA, Maire Adjointe, Pierre-Alain Weill, Délégué national, Antoine CASINI, Conseiller Général, Fatima YADANI, Maire Adjointe, Corinne AZZOUZ, Franck DUDT, Secrétaire de section, Ali ZAHI, Adjoint au Maire, Mireille LACOMBE Conseillère générale du Puy-de-Dôme, François BIYELE, Cédric VIOT, Secrétaire de section 13éme Est Paris, Jean Laurent TURBET, Membre du Bureau Fédéral des Hauts-de-Seine, Bernard SEYTRE, Raphaëlle DUFOUR, Conseil Fédéral de Paris, Présidente de l’Association DIGNITE INTERNATIONALE, Ghislaine SALMAT, Conseillère d’arrondissement Paris 16, Gaspard-Hubert LONSI KOKO, Bureau Fédéral de Paris, Selim BEN ABDESSELEM, Serge ISRAEL, Conseiller Général, Gordana CHARLEZ, Zacharia BEN AMAR, Maire Adjoint de Nanterre, Jean-Yves De FRANCIOSI, Conseiller Municipal ,Sabri LABIODH, Secrétaire de Section du 17ème Paris Hichame MAANANA, Commission Nationale du Contrôle Financier, Arthur COLIN, Jean Bernard MAGESCA, Claude BOUCHAFA, Noria CHAIB, Secrétaire de Section de Vallauris, Déléguée Nationale chargée de la prévention de la délinquance, Jean-Yves De FRANCIOS, Joel MOUSSAVOU, Laurence MOUSSAVOU, Françoise CHADES, Ike AILA NGOUANI, Pierre FREYBURGER, Conseiller Général de Mulhouse, Xavier GOLCZYK, Adjoint au Maire du 19° de Paris, Antoine LOGUILLARD, Secrétaire Fédéral à l’éducation- Ariège, Christine GRIMAUD, Malika BENM’BAREK, Conseillère Municipale à Mulhouse, Salomé MEIERS NAEM, Conseillère d’arrondissement Paris 10, Franck FARAJI, Yannick AINOUCHE, Karim AOU, Alain FONTAINE, CA Noisiel (77), Nordine AÏSSAT, Christian CASTAGNA, Colette SADIK, Georges BEN SAMOUN, Christian VURPILLOT, Comédien, Ahmed NADJAR, réalisateur, ABED Karim, Inspecteur du travail, Jean-François PICAUT, Mathieu RIGAL, Section de Berlin, Jean Philippe DANIEL, Anne ESAMBERT, Colette ILUNGA, Conseillère d’arrondissement Lyon 9ème, Romain BLACHIER, Secrétaire Fédéral, Secrétaire de section, Adjoint au Maire de Lyon, Fatma BOUVET DE LA MAISONNEUVE, Conseillère Municipale de Montrouge, Eric TREILLE, Secrétaire de section, Philippe BLANCHOT, David JACQUET, Conseil Fédéral, Conseiller municipal, Naza MOKHTARY, Secrétaire de section, Guy CIRLA, Pierre GRIMAUD NAW, Aswandeo SOOKEEAH, Fédération des Français à l’Etranger, Valérie PICQUET, Section de Bruxelles, Audrey AIT KHEDDACHE, Lynda BELHADI, Secrétaire fédérale, Bureau fédéral (92), Abdelkader BENALI, Conseiller Municipal – Rosny-sous-bois (93), Nasserdine HAIDARI, Conseiller d’arrondissement de Marseille. Gilles BON-MAURY, section de Reims

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CONGRES DE TOULOUSE – 2012 – CONTRIBUTION THEMATIQUE

Contribution thématique – Congrès  du Parti Socialiste –  Toulouse 2012

 

REPUBLIQUE ET ISLAM

 

Cette contribution est  dédiée à Olivier Ferrand  qui osait défricher des terrae incognitae.

 

 

Signataires : Bariza KHIARI, Fayçal DOUHANE,…

 

La séquence politique qui vient de s’ouvrir après la victoire de la Gauche constitue pour nous socialistes un moment véritablement stratégique par rapport aux attentes qui ont été placées en nous. Le congrès de Toulouse  représente à ce titre un exercice qui va au-delà des enjeux inhérents à un parti politique. Ce congrès doit symboliser notre  capacité à faire une autre politique, qui innove, qui ose mais surtout qui rassemble.

 

Nous sortons d’une séquence politique difficile qui a vu la France se fractionner et les français se dresser les uns contre les autres selon des lignes qui ont clivé le pays entre les générations, entre les classes sociales ou entre territoires au nom d’une idéologie portée par une partie de la droite. La stratégie de droitisation de l’ancienne majorité a eu comme conséquence dangereuse d’effacer certaines frontières entre l’extrême droite et la droite républicaine. Elle a surtout créé une confusion que nous socialistes devons impérativement lever : celle consistant à faire l’amalgame entre chômage, immigration et islam pour entretenir la crainte de l’autre et valider une vision politique fondée sur le registre de la peur.

 

Le débat sur l’identité nationale, sous prétexte de libérer la parole, s’est transformé en un vaste exutoire  islamophobe. Ceci n’a pas été sans interpeller certains de nos concitoyens musulmans ou d’autres à l’instar du grand Rabbin de France Gilles Bernheim qui disait à l’occasion du débat sur la laïcité « qu’il est de plus en plus difficile d’être musulman en France  dans un climat malsain » qualifiant de « très malade une société qui cherche des boucs émissaires » Par son approche, l’ancienne majorité condamnait de fait les musulmans à la suspicion, voire à la nécessité de donner des gages supplémentaires de républicanisme. Ce qui revenait à les sommer de choisir leur camp : soit de cautionner le procès fait à l’islam, soit  de prendre des distances avec leurs croyances. Vouloir l’Autre comme soi ou le déclarer radicalement différent sont les versants d’une même médaille : le racisme.

Bien évidemment, ces blessures  sont encore présentes et n’ont pas été effacées du jour au lendemain parce que nous sommes en responsabilité. Néanmoins, les actes et propos islamophobes sont en régression depuis la prise de fonction de François Hollande, c’est sans doute parce que l’on parle moins de ces sujets. Réconcilier les français entre eux nous demande du temps, de l’engagement mais aussi le courage de s’interroger sur ce qui a pu favoriser l’émergence de tels clivages. Force est de constater en effet qu’il existe aujourd’hui encore à gauche des sujets tabous. La religion en est un, et singulièrement, l’islam. Or, il y a urgence à tenir un autre discours sur les religions afin d’apaiser nos concitoyens. Mais il s’agit d’être vigilant et d’être ferme à l’encontre des islamistes et des islamophobes qui se nourissent réciproquement.

Le but n’est pas de définir un nouveau cadre à l’exercice aux religions, la loi de 1905 représente un horizon indépassable et inégalable dans la relation qui régit le rapport entre l’Etat et les religions. L’objet de cette contribution est d’apporter un éclairage sur des points qui nécessitent d’être tranchés dans le respect du cadre républicain, afin d’éviter que l’on ne permette de jouer à opposer à nouveau foi et citoyenneté. L’objectif que nous nous fixons est donc d’initier le débat sur le discours que la Gauche se doit de développer vis à vis  de tous les croyants et en particulier des musulmans.  Cela passe notamment par la réaffirmation du message laïc et de son application éclairée vis-à-vis de l’Islam comme des autres religions.

 

Le traitement politique du fait religieux en France : renforcer la symbolique et les principes de la laïcité pour garantir l’égalité des convictions

 

Les derniers débats portant sur l’identité nationale ont souligné la difficulté que nous avions à concevoir le vivre-ensemble indépendamment des religions. La lecture du fait religieux en France a, de fait, toujours été prisonnière de la forte charge symbolique qui entoure l’histoire de France et la place des cultes sur le territoire. Dans l’inconscient collectif la relation Etat/religions s’inscrit souvent dans une perception dualiste où projet sociétal/citoyen et croyances s’affrontent pour le monopole des valeurs. Cette vision paraît paradoxale, dans un pays où la laïcité garantit pourtant les bases d’un contrat visant à l’égalité entre tous, et dont découle la liberté de conviction. Ce constat amène naturellement à s’interroger sur les facteurs réels ou fictifs qui alimentent ou cristallisent les peurs et les passions autour des religions en France.

 

Retour du religieux en France ou difficulté à parler du religieux ?

Dans un contexte marqué par des crises de toutes natures  – qu’elles soient économiques, politiques, identitaires, sécuritaires -, le retour du fait religieux serait la manifestation symptomatique de la crise de sens que traverseraient nos sociétés modernes, sans repères ou déboussolées. Quelles qu’en soient ses origines, ce phénomène – souligne la nécessité de nous pencher sur un thème dont l’appréhension reste encore trop marquée par l’émotion.

 

Cette question du croire et de ses conséquences sur la société française ne doit pas nous effrayer ou demeurer  taboue, car d’une lecture apaisée de ces sujets découle en partie la préservation de l’esprit de concorde républicain. Chacun de nous possède une identité propre, plurielle dépendant de son vécu, de son histoire, de ses origines, de sa culture, de sa confession, de ses engagements. Cette pluralité fait la richesse de notre pays et de chacun de nous. Mais pour que cette richesse soit un gage de renforcement de notre pays, il faut un socle partagé, surmontant nos diversités pour nous permettre l’échange. Tel est l’objet de la laïcité. Elle est le ciment de notre vivre-ensemble ; matrice qui surplombe nos identités plurielles.  C’est dans cet horizon que nous devons nous nous inscrire car, comme le rappelle très justement, le philosophe Henri Pena Ruiz[1] lorsqu’il dit :

 

« La laïcité est une valeur essentielle, avec ce souci de la liberté de conscience et de l’égalité de tous les hommes, qu’ils soient croyants, athées ou agnostiques. L’idéal laïc n’est pas un idéal négatif de ressentiment contre la religion. C’est le plus grand contresens que l’on puisse faire sur la laïcité que d’y voir une sorte d’hostilité de principe à la religion. Mais c’est un idéal positif d’affirmation de la liberté de conscience, de l’égalité des croyants et des athées et de l’idée que la loi républicaine doit viser le bien commun et non pas l’intérêt particulier. […] « 

 

Toute action en France en direction des religions, doit se situer dans la perspective de cette égalité républicaine. Si pour des raisons complexes, qui parfois mêlent l’environnement économique ou le contexte international -terrorisme, conflit régional- certains discours de haine islamophobe, antisémite, antichrétienne venaient à perturber l’équilibre de nos valeurs, il est alors du devoir de la puissance publique de garantir le respect du cadre qui régit le vivre ensemble. Dans cette optique, on ne peut que se réjouir des propos tenus par  Manuel Valls,  Ministre de l’Intérieur, également ministre des cultes, qui lors de sa prise de fonction a déclaré : « Nous ne stigmatiserons aucune communauté ».

 

Ce vivre-ensemble qui garantit à chacun des droits, induit en parallèle des devoirs. Ces devoirs qui s’appliquent aux citoyens, notamment en termes de respect de nos institutions et des principes qui fondent le vivre ensemble, supposent également la vigilance de l’Etat quant aux évolutions de la société française et aux besoins qui pourraient naître de ces transformations y compris dans le champ du religieux.

 

Pour combattre les discours extrémistes ou de haine, il nous faut impérativement veiller à préserver l’équité entre tous dans le champ des libertés fondamentales conformément à l’esprit d’égalité qui anime notre projet de société. La pratique des cultes en France ne doit pas déroger à ce principe, car si la religion relève bien du domaine de l’intime, elle est par sa connotation symbolique forte un élément qui permet à l’individu de se situer par rapport aux autres dans un collectif. Cependant, la communauté de foi ne peut légitimer aucun enfermement communautariste. Afin d’éviter de tels risques, il importe de maintenir une égalité de traitement. C’est pourquoi, l’Etat ne doit pas hésiter à intervenir, lorsque des aspirations touchant au croire peuvent constituer des points de cristallisation ou d’incompréhension, alors qu’elles sont conformes au cadre qui régit la liberté de cultes

 

Sans nier la montée du fondamentalisme dans toutes les religions et s’agissant de l’Islam, l’influence croissante du wahhabisme ou du chiisme liberticide des ayatollahs iraniens, il est urgent de rappeler que l’islam ne se réduit pas à ces extrêmes. La culture islamique n’est pas homogène. Chaque société l’a adaptée à son temps et à son histoire et la présence de plus en plus importante des musulmans en Europe est un facteur d’évolution de la pensée islamique.

 

A cet égard, nous devons laisser à l’islam de France et aux citoyens musulmans de notre pays le temps d’inventer eux-mêmes les formes nouvelles d’expression et de socialisation de leur foi qui seront plus en harmonie avec le paysage culturel et l’héritage historique de la République. Et nous devons les soustraire à la pression constante de critiques et d’attaques souvent violentes qui les contraignent à adopter une posture purement réactive. C’est l’apaisement du débat non le feu des polémiques, souvent vaines, qui favorisera, à terme, en France l’émergence de cet islam-là.

 

En France, nous continuons à parler de l’islam, deuxième religion en nombre de pratiquants, comme d’un phénomène étranger, inconnu, ignoré, forcément menaçant même lorsque sa pratique est paisible et discrète. Pourtant, l’islam fait partie intégrante de l’Histoire de France. Sans remonter à Charles Martel, ni même à la colonisation de l’Algérie en 1830, il n’est pas inutile de rappeler que la Grande Mosquée de Paris a été inaugurée en 1926 en reconnaissance du sang versé pour la France par les musulmans !

 

L’ignorance qui entoure l’Islam ne porterait pas à conséquence si elle ne nourrissait l’incompréhension, les préjugés, les amalgames, entre Islam et obscurantisme et, plus grave, le rejet de l’autre. Il convient de ne pas méconnaître ces aspects puisque bien souvent, comme le soulignait Ibn Arabi, grand penseur soufi  « les Hommes sont les ennemis de ce qu’ils ignorent ».

 

Or,  force est de constater qu’il existe aujourd’hui un certain nombre de sujets concernant l’islam pour lesquels la puissance publique n’a pas encore su donner de réponses définitives ou satisfaisantes. Qu’il s’agisse « des carrés musulmans » ou de la construction des lieux de cultes, de la formation des imams notamment l’absence de formation théologique, voire la question des assistantes maternelles, « les nounous » qui a fait l’objet d’une proposition de loi du Sénat, qui a transgressé les distinctions traditionnelles entre espace public et espace privé.

L’enjeu commun à ces sujets dépasse les aspects techniques, et se situe au cœur même de la question de l’intégration citoyenne.

 

Vivre, mourir et après ? …

 

Le poète Nazim Hikmet affirmait que deux visions s’offraient au regard du mourant : « Le visage de sa mère et les rues de la ville dans laquelle on a vécu. ». Ce qu’il avançait ainsi était le lien consubstantiel du passé et du présent. La mère rappelait d’où on venait, la ville là où on avait choisi de vivre. Les choix de l’individu se matérialisent alors dans une vision de son existence. Il n’est pas surprenant que les  lieux prennent une place importante dans cette vision. Les lieux nous transforment, nous émeuvent, nous accompagnent, même au-delà de la vie.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                             

 

Or précisément, le lieu du repos éternel constitue l’occasion d’un déchirement pour de nombreux musulmans vivant en France. Notre pays ne permet que trop rarement aux musulmans de pouvoir reposer éternellement sur notre territoire, en raison du manque de carrés confessionnels.

 

A la douleur du décès s’ajoute, pour les musulmans, le déchirement de voir le cercueil du défunt rejoindre autre pays, généralement de l’autre côté de la Méditerranée, où il pourra reposer suivant les rites de sa religion.  Celui qui a vécu toute sa vie en France voire qui y est né, qui a contribué par son travail, en y laissant souvent sa santé, à la construction du pays, qui s’y est intégré se retrouve, une fois mort, enseveli dans une terre avec laquelle les liens se sont progressivement distendus ou parfois dans un pays qu’il n’a jamais connu.  Sa famille, vivant elle aussi en France dans la majorité des cas souffre d’une double absence, absence du défunt, absence d’une tombe proche sur laquelle se recueillir quand le besoin se fait sentir.

 

Le concitoyen de confession musulmane semble ainsi jusque dans la mort une pousse, un rejeton dont la France peine à reconnaître l’appartenance à la Nation. Situation qui ne va pas sans interroger la réalité  du message républicain de respect de la foi et de traitement égal de l’ensemble des religions. Aucun obstacle juridique n’existe pourtant dans le cadre de la laïcité établie par la loi de 1905. La seule volonté politique des élus doit pouvoir permettre à tous les citoyens de participer de cette intégration par la terre. A nous, socialistes, de porter ce qui n’est pas une revendication communautaire, ni une dérogation mais la possibilité d’être citoyen dans cet état que chacun connaîtra , au soir de sa vie.

 

La mise en place des carrés confessionnels dans les cimetières n’est donc pas une entorse au pacte républicain, cela conforte au contraire le triptyque ornant le frontispice de nos Institutions.

 

Les bonnes pratiques

 

La construction des mosquées constitue un autre enjeu problématique quand on parle de l’islam. Ce thème trouve de surcroît  un réel écho auprès des médias. La mosquée est un élément visible dans le paysage, il n’est alors guère surprenant de la voir devenir un épouvantail pour tous ceux qui cherchent à jouer sur les peurs, alors même que les tensions avec celles effectivement construites sont rares.

 

Ce sujet pour important qu’il soit ne doit plus constituer un objet de crainte pour les élus locaux. Des solutions existent. Les élus peuvent trouver les réponses à nombre de leurs interrogations dans le remarquable travail de synthèse de Jean Glavany publié par la fondation Jean Jaurès qui propose des solutions concrètes et réalistes dans le respect de la loi et des principes de la laïcité.

 

Des exemples de bonnes pratiques existent dont désormais les élus peuvent s’inspirer. Ainsi la mosquée de Cergy par exemple est un modèle d’un Islam de France respectueux de la laïcité. L’imam qui y prêche n’est pas, comme cela s’est trop longtemps vu, envoyé par le pays qui a financé la construction de la mosquée mais a été choisi après un appel à candidatures, le long  d’un processus transparent. Dominique Lefebvre, maire de Cergy, à su déployer une ingénierie républicaine complexe pour faire aboutir ce projet.

 

Il faut également évoquer le cas de la Grande Mosquée de Strasbourg qui a fait l’objet d’une intense communication auprès des habitants dans l’espoir que les Alsaciens musulmans ou non se l’approprient pendant et après la construction. Roland Ries a ainsi eu le courage de revenir sur une décision de Fabienne Keller, ancienne maire UMP de la ville, pour permettre la construction d’un minaret et d’un centre culturel, bravant la fachosphère, et pour traiter les musulmans à l’identique des juifs et chrétiens. Certes le maintien du Concordat en Alsace Moselle confère plus de possibilités aux élus, mais force est de constater qu’il y a surtout nécessité de traiter de manière égale toutes les religions, sans discrimination aucune.

 

Ces deux exemples démontrent que l’Islam est parfaitement compatible avec la laïcité et fongible dans l’identité nationale dès lors que l’on s’en donne les moyens. A ce titre, il conviendrait sans doute de fournir, via la FNESER une boite à outils et à idées au profit des élus locaux pour  partager les bonnes pratiques.

 

La mise à disposition de lieux décents pour la pratique du culte nous prémunira  de la visibilité des prières dans la rue qui sont d’une part, indignes pour la pratique du culte et d’autre part, qui ne sont pas tolérables pour l’ordre public.

La perception d’une égalité de traitement en matière de culte revêt un caractère d’autant plus fondamental pour la France, que la période de crise économique que nous traversons accentue les lignes de tensions sociales à l’intérieur de notre société. Pour la République, l’enjeu de l’égalité de traitement de l’Islam en France revêt un double aspect à la fois sociétal et symbolique : sociétal comme démonstration de la volonté de l’Etat à garantir un cadre juste pour tous, et symbolique par la capacité qu’il a à agréger l’altérité dans un socle commun.

 

Nous tiendrons ainsi à distance les désordres du monde qui parfois viennent se greffer sur la question de l’Islam en France.  Pour cette religion si sensible de par l’histoire qui la lie à l’Occident et au monde arabe, seule la banalisation et l’égalité de traitement dans la pratique du croire peuvent amener à préserver le vivre en commun républicain.

 

Conseil français du culte musulman et imams.

 

L’égalité de traitement entre les cultes doit également être institutionnelle. La représentation de l’Islam de France, le dialogue qu’il entretient avec l’Etat, sont de véritables enjeux. Il ne doit plus, comme cela a été le cas ces dernières années, servir à des instrumentalisations politiques qui décrédibilisent tant les instances représentatives que l’Islam de France.

 

Le dialogue avec l’Etat doit uniquement avoir trait à l’organisation du culte. Nous devons nous affranchir définitivement de l’idée que les religieux représentent toutes les personnes issues de l’immigration. Cet amalgame, qui renvoie, sans cesse, chacun à ses origines et l’assimile à une religion héritée est insupportable ; nous devons nous en défaire.

 

Nous devons également, dans ce dialogue, nous départir définitivement des allégeances aux pays d’origine. L’Islam est ancré en France ; il doit exister un Islam de France comme il existe une Eglise de France. Pour cela la formation d’imams français et républicains, non soumis aux influences extérieures, est une priorité. Espérons aussi que l’arrivée au sein du CFCM d’une nouvelle génération, dépourvue d’allégeance envers les pays d’origine, permettra à l’Islam de France de s’émanciper et de s’ancrer dans la République.

 

 

La question de la viande halal

 

Le débat sur la viande halal dépasse la stricte question religieuse. C’est aussi une question de transparence liée au droit à l’information des consommateurs, aux règles sanitaires, mais aussi une question économique. La viande française certifiée hallal est un enjeu économique important à l’export. Au delà de l’aspect religieux qui ne doit pas être sous-estimé, il s’agit de traiter cette filière également comme une question économique.

La question de la viande halal dans les cantines peut être réglée en offrant aux enfants une diversité de protéines : œufs, poisson, steak de sojas, etc. Offrir un choix est maintenant chose admise dès lors que les cantines sont en majorité des self-services.

Néanmoins, le consommateur musulman doit pouvoir être assuré que les organismes certificateurs respectent leurs engagements et les normes sanitaires.

 

De la responsabilité dans le rapport au religieux

 

Il nous importe donc de tenir sur ce sujet un discours différent de la droite, juste et républicain. Il ne s’agit pas en effet de proposer un regard conciliant vis-à-vis de comportements qui pourraient poser problème. Comme le rappelle le philosophe Abdennour Bidar, « l’écueil à éviter c’est celui de l’empathie sans discernement vis-à-vis du religieux et des musulmans qui seraient considérés exclusivement comme minorité victime d’une oppression culturelle. Une gauche qui s’en tiendrait à un discours émotionnel de l’empathie et de l’expiation serait jugée irresponsable. »

 

 

 

 

Pour un retour à une laïcité émancipatrice

 

Notre démarche politique, à nous socialistes, doit être de réaffirmer que la laïcité n’est pas hostile aux religions, elle permet de les inscrire dans une société moderne respectueuse des libertés individuelles ; la laïcité n’exclut pas, bien au contraire car elle permet à chacun, croyant ou non, de s’émanciper.

 

Conscients de cet héritage, nous devons affirmer haut et fort ce message : l’islam a toute sa place en France. Nous devons aussi changer de regard. L’islam est ancré de longue date dans notre Histoire. La République doit tenir à son propos le même langage qu’elle tient aux autres cultes. Elle doit lui accorder les mêmes droits, lui imposer les mêmes devoirs.

 

Nous socialistes et républicains, ne pouvons plus ignorer tous ceux qui vivent leur foi de façon apaisée. Nous devons être solidaires de tous les musulmans républicains qui sont aussi dépositaires comme chaque français de la laïcité. Nous devons être solidaires de tous ceux qui luttent contre les dérives du message religieux, contre ceux qui se camouflent derrière la religion pour imposer des pratiques dévoyées, qui font d’un message spirituel un discours de terreur et contre tous ceux qui facilitent par leur discours le passage à la violence.

 

 

Passer de la commisération à la considération. Répondre à la demande de dignité : La « karama »

 

Mais au delà de l’Islam, il est urgent de remédier aux causes qui ont conduit à des crispations communautaires et au développement de pratiques inspirées de courants les plus obscurantistes dans certains quartiers. Les  cause principales sont la colère et le désespoir. Nos banlieues sont en colère d’avoir été abandonnées ou mis à l’écart. Trop souvent les jeunes des quartiers populaires sont enfermés dans une identité  réelle ou supposée de « jeunes issus de l’immigration », de banlieusards, de chômeurs ou de musulmans.

 

Comment s’étonner que certains s’emparent de cette identité comme d’un étendard pour la retourner contre ceux qui la leur ont envoyée à la figure. Alors qu’il y a aussi dans nos quartiers populaires des entrepreneurs qui se révèlent, des artistes  qui émergent, des sportifs qui portent haut le drapeau tricolore. Ces jeunes de confession musulmane se définissent d’abord comme français et ils tiennent à marquer ainsi la primauté de la citoyenneté sur l’identité. Si, comme pour chaque français  la  question de l’emploi, de l’école, du logement et de la santé est importante, il y a surtout une demande forte de  dignité et de respect.

 

 Bref, au delà de l’Islam, il est urgent de re-faire de nos quartiers une véritable priorité nationale. Pour que la colère tombe et avec elle tous les comportements extrêmes qu’elle génère. Il faut des actes aussi bien symboliques que concrets qui prouvent à toutes les populations reléguées qu’elles font l’objet de la considération des pouvoirs publics. La promesse de François Hollande de faire toute sa place à la jeunesse de France doit se concrétiser jusque dans nos quartiers populaires.

 

Ainsi, la méconnaissance ou les fantasmes qui entourent l’Islam ne doivent pas être une justification à un déni de droits en matière de traitement des cultes. Appeler à ce respect de la loi pour l’Islam ne doit pas être interprété comme un appel en faveur d’une communauté en particulier, car en France il n’y a de communauté que celle des citoyens et c’est en elle seule que nous devons nous reconnaître.

 

Nous le rappelons avec force : la loi doit protéger la foi aussi longtemps que la foi ne prétendra pas faire la loi. La banalisation de l’Islam dans notre pays sera le test de crédibilité de la laïcité. Ce ne sont pas les religions qu’il faut combattre mais le pacte républicain qu’il faut rétablir.

 

 

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CONGRES DU MANS – 2005 – CONTRIBUTION THEMATIQUE

« J’ai rêvé d’un monde de soleil dans la fraternité de mes frères aux yeux bleus ». Léopold Sedar Senghor – A propos de l’idéal fugitif d’intégration…

 

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Lors du congrès de Dijon, nous avions sensibilisé nos camarades au problème des discriminations dont sont victimes des millions de français. Nous souhaitions en faire un axe fort de notre réflexion. Aujourd’hui, nous sommes inquiets et déçus. 
 Inquiets parce que notre Parti est muet sur cette question alors qu’elle est devenue centrale dans le débat public et que la Droite, découvrant un peu tard l’importance de l’enjeu, tente d’y apporter des solutions dans lesquelles la démagogie le dispute à l’hypocrisie la plus totale. 
 Déçus parce que, malgré des demandes réitérées, aucun atelier sur ces questions n’a été mis en place dans le cadre du Projet.

La crise que traverse notre pays traduit le délitement du ferment de notre cohésion sociale et de notre volonté de vivre ensemble. La promesse d’égalité des chances n’a pas été tenue par la République. Elle est battue en brèche par la violence des inégalités et des discriminations. Le pacte républicain selon lequel la promotion des citoyens se fait, sans distinction de race, de sexe, de religion, mais seulement au regard du mérite, est moribond.

La France, de plus en plus diverse et riche de ses métissages, ne se reconnaît pas dans des partis caractérisés par un déficit flagrant de représentativité. Ce décalage aggrave la crise politique dans un contexte où les attentes des citoyens ne sont ni vraiment comprises, ni réellement prises en compte.

La classe politique française a été incapable de corriger les inégalités et d’enrayer les discriminations. Il suffit d’observer, parmi les millions d’hommes et de femmes issus de l’immigration et des DOM-TOM présents sur le territoire français, pour certains depuis plusieurs générations, le nombre de chômeurs et de travailleurs précaires et la quasi absence de cadres supérieurs et d’élus politiques, pour se convaincre de l’énorme décalage qui existe entre les discours et les actes, dès qu’il s’agit de défendre les intérêts des plus fragiles parmi nous.

La droite a choisi d’ajouter le communautarisme à son modèle libéral de concurrence entre les individus. La gauche doit réagir pour imposer sa vision de la justice et de l’égalité effective. La promotion sociale des Français issus de l’immigration et des DOM-TOM et l’élaboration d’une véritable politique d’égalité républicaine doivent être menées de front et de manière volontariste.

L’OBJECTIF D’EGALITE REPUBLICAINE

« Mal nommer les choses, c’est participer aux malheur du monde » Albert Camus Le terme d’intégration est choquant quand il s’apparente à une injonction faite à des Français, nés dans notre pays et qui n’ont jamais vécu ailleurs. Ces personnes n’ont pas à être intégrées à la communauté nationale puisqu’elles en font en partie. C’est à la communauté nationale qu’incombe le devoir de rappeler qu’ils sont des citoyens à part entière. « Moins égaux que les autres », devraient-ils prouver leur bonne volonté citoyenne en s’intégrant ?

Cessons donc de parler d’intégration et parlons plutôt d’accès à l’égalité républicaine. En matière d’égalité, il ne peut y avoir ni pensée molle, ni concept incertain. Renvoyer à la case « Intégration », un Français né en France, ne peut que fausser les règles du jeu et servir à camoufler les dénis d’égalité. C’est la raison pour laquelle, nous refusons que les différences réduisent pour une partie de nos concitoyens, l’égal accès à des droits légitimes. « La République ce n’est pas de reconnaître des égaux, c’est d’en faire ». Notre action doit viser le rétablissement de l’égalité par la garantie pleine et entière d’accès aux mêmes droits et devoirs pour tous. La République doit être Egale.

L’EGALITE AU TRAVAIL En matière de discrimination au travail, le constat est sans appel. Une étude menée par l’université de Paris I a dissipé le brouillard statistique derrière lequel se cachait l’inaction des pouvoirs publics en matière de discriminations.

Pour les travailleurs indépendants et les professions libérales, la réussite de nos compatriotes issus des minorités est sensiblement équivalente aux autres parce qu’il n’y a pas de passage obligatoire en classes préparatoires, ni de directeur des ressources humaines à convaincre. En revanche, c’est dans l’entreprise, dès les procédures d’embauche, que la discrimination est flagrante.

Contrairement à une idée reçue, plus le niveau de diplôme est élevé, plus la discrimination à l’embauche est évidente. Cette rupture spécifique et nouvelle dans notre société entre réussite scolaire et promotion sociale est très préoccupante. Elle apparaît comme l’une des raisons pour lesquelles les plus jeunes ne croient plus au rôle d’ascenseur social de l’école. Elle vient s’ajouter au handicap du à l’absence de réseaux, apanages des milieux favorisés. La promesse républicaine du salut par les études est chaque jour pris en défaut. Pourtant, les solutions existent pour rétablir le pacte républicain pour l’emploi.

1- Les institutions publiques. L’Etat et les collectivités publiques devraient conditionner l’attribution des marchés publics au respect par les entreprises d’engagements inscrits dans une Charte de lutte contre les discriminations et pour l’égalité. Dans les offres pour l’obtention de marchés publics, le mieux-disant social doit être valorisé et pris en compte pour la dévolution d’un marché. Cela est possible. En effet, le Nouveau Code des marchés publics précise que « la définition des conditions d’exécution d’un marché dans les cahiers des charges peut viser à promouvoir l’emploi de personnes rencontrant des difficultés particulières d’insertion ».

Les concours d’accès à la fonction publique sont de fait réservés à une minorité sociale qui a le privilège d’être informée des opportunités de concours. L’administration ne fait pas l’effort de faire connaître les carrières publiques existantes. Instaurons l’obligation d’informer nos jeunes des carrières offertes dans les services publics dès la classe de 3ème.

La proposition de rendre anonyme le traitement des CV, mérite d’être étudiée afin d’empêcher la présélection en fonction du nom, de l’adresse, du faciès ou de l’âge. Cet anonymat ne garantira pas contre les discriminations, puisque demeure encore l’obstacle de l’oral. Mais, comme l’explique Patrick Weil, « dans un entretien, des préjugés peuvent tomber, et il est plus facile, pour un recruteur, de jeter un bout de papier à la poubelle que de mettre un individu à la porte… »

Pour tout concours, les épreuves écrites – qui constituent la première sélection – sont anonymes et ce n’est qu’à l’étape de l’oral que la personnalité et le profil du candidat retenu entrent en jeu. Nous ne proposons rien d’autre que de transposer au secteur privé un mécanisme égalitaire et républicain de sélection.

2- Les entreprises doivent participer à la valorisation de la diversité. Certaines entreprises ont compris que la diversité dans le recrutement est un atout. Elles ont signé la Charte de la diversité. Pour aller au-delà de la dimension marketing de ce type d’initiative, il convient de généraliser les bonnes pratiques. Celles-ci, sous l’impulsion de la puissance publique, consistent à inciter les entreprises à inclure un chapitre « Lutte contre les discriminations et pour l’égalité » dans leur bilan social, mentionnant les indicateurs de promotion de la diversité.

Cette incitation pourrait se faire par la mise en place d’un label public sur le modèle de l’éco-label. Il serait attribué aux entreprises qui jouent le jeu de la diversité et qui établissent la traçabilité des procédures de recrutement. Ainsi, la présence d’une « photo de famille », à chaque niveau de responsabilité, et notamment au niveau des cadres supérieurs de l’entreprise en premières pages du bilan, pourrait les inciter à combattre le phénomène de « plafond de verre », et serait, à défaut de statistiques, un outil pertinent pour mesurer les progrès accomplis.

3- Ouvrir les emplois dits « fermés » et offrir des conditions de travail égales aux étrangers travaillant en France. Nous proposons pour l’Etat et les entreprises publiques, exception faite des emplois touchant à la sûreté de l’Etat, l’accès à l’ensemble des emplois dits « fermés ». Nous proposons aussi la validation des acquis professionnels en faveur des praticiens hospitaliers, titulaires de diplômes étrangers, qui dispensent les mêmes actes que leurs collègues titulaires d’un diplôme français et qui sont victimes de la précarité, et d’une exploitation salariale scandaleuse.

4- Améliorer l’efficacité de la HALDE. La création de la « Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et la promotion de l’Egalité » est un message envoyé par la République aux personnes victimes de discriminations. Mais pour que cette nouvelle autorité ne subisse pas le sort des institutions créées sous la pression des événements et aussitôt rangées aux côtés des accessoires de la République, il faudra lui attribuer un vrai budget, s’attacher également à la territorialiser pour la placer au plus près des victimes. Les discriminations se constatent sur le terrain, et leurs victimes sont souvent dans une situation difficile qui les empêche d’entamer des procédures complexes auprès d’une autorité perçue comme trop loin de leurs préoccupations. Enfin, il faudra créer un corps d’inspecteurs spécialisés.

L’EGALITE DANS L’EDUCATION

Coupant court aux idées reçues, Thomas Piketty a montré, dans une étude sur le panel primaire 1997, que là où on met les moyens, la réussite scolaire augmente. Il faut donc continuer la politique en faveur des zones d’éducation prioritaires et lui donner plus de moyens.

1- Lutter contre le cumul des discriminations : Agir sur les conditions d’études. Un enfant des cités aura moins de chances de réussir à l’école s’il ajoute, au handicap de l’analphabétisme de ses parents, l’absence de conditions normales d’épanouissement scolaire. Il convient de pouvoir accueillir, ceux qui le souhaitent, dans des internats pour rompre le cercle vicieux de la précarité et de la promiscuité.

2- Permettre l’autonomie des jeunes en formation : L’accès des jeunes à un enseignement supérieur de qualité dépend largement des capacités financières de leurs parents. Les bourses d’étude existent, mais les effets de seuils excluent du système beaucoup de ceux qui en auraient besoin. Il faut procéder à une refonte du système d’attribution des bourses. Versées généralement aux familles, elles pourraient être remplacées par une allocation unique attribuée à tous les jeunes en formation, autonomes fiscalement, et sous conditions d’assiduité.

3- Permettre l’accès de tous aux métiers de l’enseignement. Héritiers de la « République des instituteurs », nous savons que les maîtres d’écoles ont joué dans l’histoire de France un rôle essentiel. Nous avons besoin de nouveaux hussards de la République porteurs d’exemplarité pour les jeunes des cités défavorisées. La diversité dans le corps enseignant est, plus qu’ailleurs, une nécessité. Nous soutenons la mise en place d’un pré-salaire dès le baccalauréat pour les étudiants qui s’engagent à entrer dans l’Education nationale et à y exercer durant un certain nombre d’années.

4- Revoir la sectorisation : La sectorisation n’évite pas la ghettoïsation. Elle doit être réformée en profondeur pour permettre à l’école de redevenir un lieu de mixité sociale.

5- Favoriser l’apprentissage de la diversité. Cette mixité est un préalable à l’égalité des chances. Elle est une richesse culturelle. L’Ecole de la République doit tenir tout son rôle de formation du citoyen et d’apprentissage du vivre-ensemble.

Les programmes scolaires pourraient être complétés, dans le strict respect de la laïcité, par l’enseignement des cultures, de l’histoire des religions comme faits de civilisation, de l’histoire des migrations, des droits de l’homme et de l’esclavage ainsi que du processus d’émancipation des femmes.

Il faut bien entendu mettre un terme à l’enseignement d’une histoire officielle qui occulte les aspects embarrassants de notre histoire. Le Parlement français vient d’adopter, le 23 février dernier, une loi dont l’article 4 dispose que « les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française d’outre-mer, notamment en Afrique du Nord ». Le principe même qu’une loi dise l’histoire est inacceptable. Cette instrumentalisation du passé peut être interprétée comme un message de mépris par les personnes originaires de pays anciennement colonisés. Nous demandons l’abrogation pure et simple de cet article de loi.

6- Promouvoir la laïcité. L’école est le lieu où les enfants apprennent à vivre ensemble. L’application stricte du principe de laïcité y est primordiale. Pour que la République s’arrête « au seuil des consciences », il faut éviter l’intrusion des croyances personnelles dans l’espace de l’école publique. Le combat laïque est un défi permanent qui appelle une vigilance de tous les instants.

7- Découvrir, promouvoir et décentraliser l’excellence. Le talent est partout. La réussite, en revanche, est concentrée dans les zones les plus riches. Si le modèle républicain de promotion sociale se fonde sur l’excellence, celle-ci doit être accessible à tous, en fonction des seules capacités individuelles, et non pas socialement sélective. Pour assurer une meilleure égalité des chances, dix pour cent des meilleurs bacheliers de chaque lycée devraient bénéficier d’un accès réservé aux classes préparatoires et aux premières années des établissements sélectifs. Les filières d’excellence sont trop rares, et trop centralisées. Ce type de formations doit pouvoir être accessible aussi dans les zones en difficulté

8- Valoriser les parcours de réussite . Il faudra prévoir dans le cahier des charges des chaînes publiques de télévision une obligation de promotion de la diversité ainsi que des campagnes de sensibilisation « grand public » sur ces questions.

L’EGALITE DANS L’ACCES AU LOGEMENT

Avec la loi de modernisation sociale votée en janvier 2002, les socialistes ont fait un premier pas vers plus d’égalité dans le logement. Mais les effets concrets de cette disposition se font encore attendre.

La discrimination dans le logement revêt une ampleur considérable. Deux formes de discrimination existent. Le premier facteur discriminant reste le niveau des ressources, mais il existe aussi une discrimination spécifiquement raciste ou xénophobe avérée : les personnes issues des minorités visibles subissent des discriminations quel que soit le niveau de leurs revenus.

La discrimination dans le logement est tellement intériorisée qu’elle s’auto-alimente. Les ménages victimes hésitent à entamer une procédure contentieuse. Pourtant, le recours est possible puisque la loi de modernisation sociale définit une incrimination relative à la discrimination face au logement et aménage la charge de la preuve dans un sens favorable au plaignant.

Les réticences des bailleurs, l’absence d’incitation et la faiblesse ou l’absence d’aide des pouvoirs publics, sont pour une grande part responsables d’une ségrégation territoriale qui remet en cause la mixité sociale. Sans oublier que les inégalités d’accès au logement nourrissent les inégalités sociales : échec scolaire, stigmatisation des établissements d’enseignement situés dans les quartiers difficiles, difficultés de trouver un emploi lorsque l’adresse sur le CV est connotée socialement.

1- Une régulation indispensable du marché immobilier : Le déséquilibre entre l’offre et la demande accentue les pratiques de mise à l’écart. Quelques pistes pour résorber ces tensions : 
 En construisant des logements sociaux et en remobilisant le parc privé, par la réinstauration des incitations fiscales pour la construction de logements neufs et la réhabilitation de logements anciens. 
 En renforçant les moyens consacrés à l’Agence Nationale pour l’Amélioration de l’Habitat afin de développer la restauration des logements insalubres. 
 En favorisant l’accès des personnes en situation de faiblesse sociale à un logement décent par la création d’une Couverture Logement Universelle qui comprendrait, outre les aides existantes, une avance du dépôt de garantie et une caution solidaire en garantie des loyers et charges 
 En mettant en place un système de mutualisation des risques d’impayés de loyers pour inciter les bailleurs à mettre leurs logements vacants sur le marché. 
 En suscitant l’anonymat des demandes de logement par un dispositif d’indifférenciation des dossiers : les données nominatives seraient ainsi remplacées par un numéro de dossier.

2- Agir par l’exemple, là où nous sommes aux responsabilités. En finir avec la préférence locale pour les logements sociaux, par laquelle certains maires exercent en fait une préférence nationale déguisée. Signer avec les organismes constructeurs et bailleurs une charte de lutte contre les discriminations et pour l’égalité dans l’accès au logement.

3- Assurer une vraie mixité sociale. La loi Solidarité et Renouvellement Urbain avait fait obligation aux communes de se doter d’un taux minimum de logements sociaux et l’avait assortie du paiement d’une amende en cas de non-respect. Nous proposons de faire respecter cette obligation en supprimant la défausse par le paiement de l’amende. Par ailleurs, le droit de préemption des municipalités doit pouvoir davantage être utilisé pour favoriser cette mixité.

L’EGALITE DANS LA CITOYENNETE

1- Vote aux élections locales : sommes-nous encore crédibles ? Nous sommes pour le vote des ressortissants non communautaires aux élections locales et nous regrettons la volte-face des socialistes sur cette question. Il faut se rappeler que le 14 février 1989 le Parlement européen a voté une résolution demandant aux pays membres d’accorder ce droit de vote et que le gouvernement socialiste de l’époque avait entamé une procédure parlementaire pour engager une telle réforme, mais sans la mener à son terme. Nous nous interrogeons sur notre capacité à remettre sur le métier cette question sans entamer à nouveau notre crédibilité.

2- Rétablir le droit de vote pour les étrangers non communautaires aux élections consulaires. Il ne peut y avoir de discrimination fondée sur la nationalité pour ces scrutins. En 1999, les socialistes avaient élargi ce droit de vote aux artisans non communautaires ; une avancée que la droite s’est empressée de remettre en cause par un décret du 24 août 2004. Il nous appartient de rétablir ce droit ; de l’élargir à l’éligibilité et de l’étendre aux chambres de commerce et d’industrie.

3- Faciliter les procédures de naturalisation et d’obtention des cartes de séjour : Nous nous opposons à l’extension du délai de séjour pour l’acquisition de la nationalité française. Par ailleurs, il nous faudra prendre un engagement clair sur les délais de naturalisation, de délivrance et de renouvellement des cartes de séjour. Les titres de séjour d’un an renouvelable entraînent une insécurité forte pour les personnes en situation régulière. Nous proposons que le premier titre de séjour passe à deux ans suivi par un titre de dix ans, avec droit d’aller-retour.

L’EGALITE DANS LES DROITS POLITIQUES

Depuis le Congrès de Dijon, quelques progrès ont été enregistrés dans la représentation des militants issus de l’immigration et des DOM TOM, au sein des instances nationales et du collège des élus. Cela n’a pas empêché cependant les candidats issus des minorités visibles de faire les frais des fusions de listes. Le retard dans ce domaine était particulièrement choquant. Le présent Congrès doit poursuivre le mouvement. Nous serons particulièrement attentifs à ce que le Parti ne revienne pas à ses anciennes pratiques. La justesse de ce combat doit s’imposer à tous comme cela est toujours le cas pour les droits des femmes.

A chaque scrutin, des cantonales aux sénatoriales, la présence de militants issus de l’immigration et des DOM-TOM ayant fait leurs classes au sein du Parti a été un facteur de succès.

Notre objectif n’est pas de fabriquer des élus à tout prix, mais d’abord de défendre des valeurs de justice et d’égalité. La démocratie représentative passe par une meilleure adéquation entre le peuple dans sa diversité, et ses représentants. Un parti tel que le nôtre ne peut forger son projet et ne peut organiser sa démocratie interne, sans tenir compte de la diversité de la société. C’est pourquoi nous renouvelons notre demande d’ouverture d’un atelier portant sur la lutte contre les discriminations et pour l’égalité effective, dans le cadre du Projet.

Pour contribuer à la victoire en 2007 et pour rattraper le retard en la matière, nous formulons des propositions concrètes :

 L’organisation dès le premier trimestre 2006 d’une Convention nationale sur le thème de la lutte contre les discriminations et pour l’égalité effective. 
 La réservation de circonscriptions, de cantons et de municipalités pour les militants reconnus issus de l’immigration et des DOM TOM. 

***

« La République est un idéal – il arrive encore trop souvent qu’elle soit une promesse mal tenue »

Le Parti Socialiste a toujours été à la pointe du combat pour la sauvegarde et la diffusion des valeurs humanistes. Il ne peut rester en marge de l’évolution de notre société. Sa vocation en tant que laboratoire d’idées lui a souvent permis ; non seulement d’être en avance sur les autres formations politiques, mais d’anticiper les inéluctables évolutions tant qu’il est resté proche des préoccupations de ceux qu’il est sensé représenter. Aujourd’hui, le rythme des changements et des bouleversements s’accélère sous l’effet d’une mondialisation non maîtrisée. L’adaptation à ces bouleversements, pour légitime et nécessaire qu’elle soit, ne doit pas se faire au détriment des valeurs qui fondent le socialisme. Face au marketing politique de la Droite qui attise le communautarisme, nous devons être intransigeants sur les valeurs républicaines d’un côté, et lutter contre les discriminations et pour l’égalité républicaine, de l’autre : c’est cette démarche qui doit guider les Socialistes

50 Premiers signataires : KHIARI Bariza (75), DOUHANE Fayçal (75), LE NEOUANNIC Pascale (92), AIDENBAUM Pierre (75), TESSIER Séverine (92), BARTOLONE Claude (93), SAUVAGET Jean François (52), AKSIL Mustapha (81), ALBERT Louis (75), BELAKHDAR Abdelhamid (93), BENEDETTI Guy (75), BEN ABDESSELEM Sélim (93), BOISTARD Pascale (75), BONNET Flora (75), BRAHIMI Nadia (94), CAMUS Françoise (75), CHARZAT Michel (75), CARDINAL Jean Luc (75), CORBIERE Alexis (75), CHAMPREDON Michel (27), CAREL FATIGON Pierre Olivier (93), CASINI Antoine (14), CASTAGNOU Pierre (75), CLUET Isabelle (75), CHARMONT François (75), CHIKIROU Sophia (75), DELARUE Magalie (75), DRET Jean Jacques (94), DJAFFER Djilali (52), DUFOUR Raphaëlle (75), DULOS Jean Baptiste (75), GAUTIER Charles (44), GUEDJ Jérôme (91), GUIS Jean Pierre (75), KALTENBACK Philippe (92), KISMOUNE Ali (38), LE FRANCOIS Magali (14), LEVARD Laurent (75), LOISELET Eric (52), LONSI KOKO Gaspard (75), MOKHTARI Naza (75), MAFFEIS Laurent (92), MORISOT Nelly (SBN MJS), MENGUE M’eyaa (93), MAURICE-BELLAY Janine (93), PERISSE Bertrand (75), PORCEDO Jean Luc (95), RIMBAULT Christine (75), ROIRON Claude (27), SIMONNET Danielle (75), TOUIZ Nadia (38), VIPREY Mouna (93), YADANI Fatima (75), YAMGNAGNE Kofi (29)…. Pour continuer le débat : congresdumans@yahoo.fr

 

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