12 janvier 2011
Dès les premières heures de l’année, 21 chrétiens étaient massacrés à la sortie de la messe, devant l’Église des Saints d’Alexandrie en Égypte.
Deux mois auparavant, veille de la Toussaint, des terroristes assassinaient 45 chrétiens dans la cathédrale de Bagdad. Des atrocités commises «au nom de l’islam».
Nous rappelons, haut et fort, que ces meurtriers ne sont pas l’islam, et qu’ils ne représentent en rien les musulmans. Nous voulons signifier par cet Appel notre refus de ce rapt de nous-mêmes: celui dont on usurpe l’identité est plus à même de démasquer le faussaire.
L’instrumentalisation de la religion est certes trop souvent, ici, le fait de certains médias ou politiques. Elle reste, de par le monde, la terrible arme des extrémistes. Et ce sont eux qui tuent, dans différents pays, des femmes, des hommes et des enfants de toutes confessions, dont de nombreux musulmans.
Le meurtre de chrétiens, comme de tout être humain, est une horreur absolue. Et c’est aussi l’islam qu’on assassine en commettant ces crimes en son nom. Alors comment se taire quand on tue en votre nom?
Depuis la France, les citoyens de foi, de tradition ou de culture musulmane – ou héritiers de ces références – veulent ici dire leur indignation devant ces crimes. Pour leurs voisins, pour leurs enfants et pour eux-mêmes, contre les amalgames destructeurs. Ils clament haut et fort leur refus de l’intolérance et des violences commises, de par le monde, à l’encontre de minorités. Et plus fort encore lorsque certains bafouent leur foi ou leur identité en tuant au nom de l’islam.
Construisons partout le vivre ensemble dans nos pays multiconfessionnels.
http://www.respectmag.com/2011/01/12/bariza-khiari-«-le-terrorisme-n’-pas-de-religion-»-4759
Bariza Khiari: « Le terrorisme n’a pas de religion »
MER, 12/01/2011
Par: Chloe Goudenhooft
Bariza Khiari est sénatrice socialiste de Paris. Signataire de l’Appel lancé aujourd’hui par Respect Mag, elle explique son engagement.
Pourquoi avoir d’emblée signé et soutenu ce texte ?
J’ai adhéré immédiatement en référence à l’émir Abd el Kader. Au nom de sa foi, de l’islam, il a sauvé les chrétiens de Damas en 1860. L’année dernière, cela faisait 150 ans, et personne n’a fêté cet anniversaire ! Aucune manifestation n’a été organisée. Je me place dans cette lignée de l’islam, en continuité du judaïsme et du christianisme.
L’islam, ce n’est que ça. Aucun acte de violence ne peuvent être commis au nom de cette religion. Le terrorisme, la folie n’ont pas de religion. La violence nie et annule toute puissance sacrée. Nous croyons au pluralisme religieux, il faut soutenir nos frères chrétiens d’Orient et d’ailleurs. C’est le patrimoine de l’humanité.
La position des chrétiens d’Orient n’est-elle pas un miroir inversé de celle des musulmans en France ?
Hier, nous étions un peu des Roms, aujourd’hui, nous sommes des chrétiens d’Orient ! Les situations ne sont pas de même nature mais, de chaque côté, il y a stigmatisation. Et lorsqu’une minorité est désignée, on ne sait pas jusqu’où les choses peuvent aller.
L’Europe, qui a été le foyer de drames terribles, nous l’a montré à plusieurs reprises. Cela montre aussi que l’intolérance n’est pas toujours du même côté. Elle se trouve du côté de l’État, dans le cas des Roms, comme du côté des extrémistes, dans le cas des chrétiens d’Orient.
La nécessité de cet appel est-elle liée au climat actuel ?
Marine Le Pen a lancé les thématiques électorales. Or, nous serons les otages de la campagne. La cible, ce ne sont plus les immigrés, puisqu’il s’agit plutôt d’enfants d’immigrés aujourd’hui. Ce sont désormais les musulmans qui sont visés. L’islam est devenu un enjeu politique. On l’oppose à la laïcité. Et on en fait une source de division alors que la laïcité est une chose magnifique. Mais elle doit être constructive. Elle doit correspondre à un espace de concorde qui permette le vivre-ensemble.
Cela dit, nous n’adressons pas d’injonction. Par cet appel, nous opposons la connaissance à l’ignorance. L’islam est méconnu, et notamment par certains musulmans eux-mêmes.
Est-ce la voix d’une majorité silencieuse qui s’élève ?
Oui. Qu’on ne nous dise plus que nous ne réagissons pas ! En même temps, lorsqu’il s’agit de critiquer l’islam, là on vient vers nous. Mais quand nous évoquons les discriminations, la ghettoïsation, personne n’est à nos côté. De même, lorsque nous parlons d’un islam d’amour, d’un islam profond, de paix, là personne ne nous écoute, aucun micro n’est tendu vers nous. Or, le vrai, le véritable islam, c’est cela. Il s’agit avant tout d’une spiritualité. Aujourd’hui, l’islam devient une question politique. Il est utilisé et instrumentalisé par les politiques et les extrémistes. En France comme ailleurs. L’islam n’est pas coupable des atrocités du terrorisme.